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CHAPITRE IV.

DU CÉRÉMONIAL DIPLOMATIQUE.

$. 33.

Du cérémonial diplomatique en général (1).

E

Le cérémonial diplomatique, dit Mr. DE FLASSAN (2), quoique assez insignifiant dans l'analyse philosophique, ne l'est pas, quand on songe que la dignité qu'on y porte agit beaucoup sur l'esprit des peuples et que l'oubli ou le refus d'observer ces graves riens seraient regardés comme un outrage public qu'il faut prévenir par une sévère observance des formes. Tout profession relevée, a des usages sacrés qui ont beaucoup moins d'inconvéniens que la confusion absolue des rangs et la familiarité dans les relations politiques.

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Le cérémonial diplomatique n'est pas le même partout dans les cours des puissances du premier

(1) Sur le cérémonial à observer dans les compositions diplomatiques voyez §. 86.

(2) Voyez son Histoire de la diplomatie française T. IV, p. 382.

rang, et la complaisance et la courtoisie et même le hazard y ont introduit souvent des modifications que le protocole diplomatique recueille avec soin (3).

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C'est surtout depuis l'établissement des missions permanentes et des congrès tenus à Osnabrück, à Nimwégue et à Riswick que le cérémonial diplomatique resultant de la différence des rangs des puissances entre-elles et de celles de leur ministres, fut établi d'une manière plus ou moins fixe, soit par des traités ou des conventions faites à ce sujet, soit par des réglemens ou des usages suivis dans les différentes cours en particulier (4).

Voici toutefois quelques observations générales à faire touchant cette partie du droit conventionnel ou coutumier.

Dans tout ce qui touche le cérémonial diplomatique il ne faut rien établir qui puisse blesser le caractère public de l'agent diplomatique, ou porter atteinte aux privilèges dont il jouit.

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S'il appartient aux souverains de déterminer le degré d'honneur et les distinctions qu'ils veulent ac

(3) Le protocole diplomatique embrasse les qualifications qu'il faut accorder aux souverains et aux états, qu'ils soient monarchiques, aristocratiques ou populaires, et le cérémonial règle la mesure des honneurs et le rang, voyez ibid. (4) Dans le moyen âge se développerent les formes diplomatiques. Des hérauts inviolables déclaraient les guerres; députés, des commissaires également inviolables négociaient les trèves et les traités en général peu compliqués. Mais la paix signée ou jurée, les négociateurs, déposaient leur caractère et retournaient près de leurs maitres. Voyez, DE FLASSAN dans les discours préliminaires de son ouvrage p. 19.

des

corder aux ministres étrangers, il leur importe cependant d'y mettre beaucoup de circonspection, depuis que l'on considère comme tenant essentiellement à la dignité des souverains et des nations qui les envoient, les égards que l'on a envers eux; et que tout ce qui peut les blesser est regardé comme un manque d'égard et selon les circonstances comme une injure même. Il s'en suit qu'à moins de motifs réels, les souverains évitent en général avec soin, les exceptions et les préférences.

Les deux points essentiels et les plus délicats du cérémonial diplomatique, sont le rang et les qualifications. L'usage suivi dans chaque cour en particulier doit servir de guide à cet égard, c'est la seule règle à suivre en matière de cérémonial. Il y a au surplus une distinction essentielle à faire à ce sujet: ou bien le cérémonial concerne la cour même où le ministre réside, et alors celle-ci est responsable de tout ce qui aurait été fait, ou de ce que le ministre aurait éprouvé de contraire au cérémonial usité: ou bien le cérémonial est relatif aux ministres entre eux, comme par exemple lorsqu'il sagit de leur rang etc. Dans ce dernier cas, la cour n'a aucun droit d'intervenir et la prudence le lui défend même (5).

Comme le cadre de cet ouvrage ne permet point

(5) Ce ne fut point au gouvernement anglais que Louis XIV s'adressa lors de l'aventure du Maréchal d'Estrades avec Mr. de Vatteville ambassadeur d'Espagne: c'est à Madrid que ce monarque porta ses plaintes et fit valoir ses droits. L'histoire diplomatique des cours fournit nombre d'exemples do

cette nature.

d'entrer dans les détails nombreux et à la fois minutieux d'une matière aussi vaste que celle du cérémonial diplomatique de chaque cour en particulier, on se bornera uniquement à donner dans les paragraphes suivants, quelques notions générales des principes les plus généralement reconnus et suivis aujourd'hui par la plupart des grandes cours de l'Europe (6).

S. 34.

Des audiences publiques et privées (1).

Quelque soit le rang de l'agent diplomatique envoyé à une cour étrangère, son premier devoir en arrivant dans le lieu de sa résidence est celui de notifier ou de faire notifier son arrivée au ministre des affaires étrangères.

Si l'agent diplomatique est de première classe, cette notification se fait ou par le secrétaire d'ambassade ou de légation, ou bien par un gentilhomme attaché à la mission que l'on charge alors de remettre la copie de la lettre de créance au chef du ministère des affaires étrangères, en demandant le

(6) Quoique dans le règlement fait le 19 de mars 1815, au congrès de Vienne, par les ministres des huit puissances signataires du traité de Paris, il ait été expressement dit qu'il serait déterminé dans chaque état un mode uniforme pour la réception des agens diplomatiques de chaque classe, on ne s'est guère occupé jusqu'ici de ce travail.

(1) Voyez sur les audiences, WICQUEFORT T. I, Sect. 19, p. 229. BYNKERSHOEK Liv. II, Chap. 7. FINET p. 43, 47, 63, 67, 93, 250.

jour et l'heure à laquelle le ministre peut être admis à l'audience du souverain (2).

Les ministres de seconde classe pourraient sans doute faire connaître leur arrivée au ministre des affaires étrangères de la cour près de laquelle ils viennent résider, de la même manière que l'on vient d'indiquer plus haut; mais assez généralement ils se bornent ainsi que ceux de troisième classe, (qui ordinairement n'ont point avec eux de secrétaire de légation ou d'attachés,) à notifier leur arrivée par écrit, en demandant au ministre des affaires étrangères de vouloir bien prendre les ordres du souverain, relativement à la remise de la lettre de créance dont ils sont porteurs.

Quant aux Chargés d'affaires qui ne sont accrédités qu'auprès du ministre des relations extérieures, ils notifient leur arrivée de même par écrit en demandant à celui-ci l'heure à laquelle ils peuvent lui remettre leur lettre de créance.

Après que la notification de l'arrivée du ministre a été faite dans les formes, et que de la part du ministre des affaires étrangères le compliment d'usage a été rendu, le ministre est admis à l'audience du souverain (5). Elle peut être publique ou privée selon

(2) C'est le cérémonial de chaque cour et le rang du ministre qui arrive, qui décident le plus souvent, s'il doit attendre ou bien s'il doit faire sa première visite au ministre des affaires étrangères.

(3) Voyez, le Moniteur de 1814, No. 237, la relation de l'audience publique que le roi de France donna au mois d'Août 1814, au Duc de Wellington, ambassadeur extraordi

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