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talie que l'empereur avait chargés du rôle de conciliateurs. C'étaient M. de Baral, archevêque de Tours; le cardinal Maury, nommé à l'archevêché de Paris; M. Duvoisin, évêque de Nantes; M. Hirn, évêque de Trèves; M. Bourlier évêque d'Évreux; l'évêque de Plaisance, et les évêques de Feltre et de Faënza.

C'est au milieu de cette cour que le pape attendait que ses contestations politiques avec Napoléon se terminassent; et déjà les difficultés semblaient s'aplanir.

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Entre la résidence de Rome, que réclamait le saint père et qu'il ne pouvait obtenir, et celle de Paris dont le palais épiscopal avait été préparé à grands frais pour le recevoir, mais pour laquelle il avait une répugnance extrême, on proposait Avignon, et de part et d'autre on semblait se rapprocher.

Outre cette question principale, il en était une autre non moins importante pour la tranquillité et la stabilité de l'église gallicane.

Depuis trop long-temps plusieurs siéges auxquels l'empereur avait pourvu restaient vacans par suite des retards que la chancellerie apostolique apportait à l'expédition des bulles. Ce ne sont pas seulement d'anciens évêchés qu'on laisse sans pasteurs, ce sont même des églises nouvelles qu'on repousse. Le croira-t-on? Il s'agit de

l'établissement d'un évêché à Hambourg, à Amsterdam, à Dusseldorf : c'est l'empereur qui le propose, et c'est la cour pontificale qui laisse échapper une telle conquête!

Dans le désir de mettre un terme à ces discussions, l'empereur demandait que le pape fût renfermé, dans un délai fixe pour l'expédition des bulles, comme il l'était lui-même pour la nomination des évêques par le concordat de 1801.

Napoléon avait proposé que ce délai fût de trois mois. Les évêques de l'empire et du royaume d'Italie, consultés, l'avaient porté à six, et cette dernière proposition, soumise respectueusement au saint père, ne paraissait pas avoir été reçue avec défaveur,

Les affaires étant parvenues à ce degré de maturité, il y avait donc des espérances fondées de réconciliation. L'empereur prend le parti de se transporter à l'improviste à Fontainebleau pour brusquer la fin de cette négociation, qui dure depuis trois ans. Il est surtout déterminé à cette démarche par les sentimens de vénération et d'amitié que personnellement il porte au saint père 1.

'Les discussions qui ont régné entre Napoléon et le pape sont d'autant plus déplorables, qu'il n'a jamais existé entre eux aucun éloignement ou inimitié personnels. De

Le 19 janvier, une partie de chasse est commandée pour Grosbois. Napoléon s'y rend; mais, après la chasse, il fait tourner bride sur Melun, et de Melun gagne Fontainebleau. Son arrivée inopinée surprend le pape et prévient l'effet des mauvais conseils qu'on n'aurait pas manqué de lui donner. Le saint père le reçoit avec affection le même avec plaisir. Le lendemain, il lui rend sa visite. L'entrevue dure plus de deux heures ; elle a lieu dans le cabinet des petits appartemens. On se dit d'abord tout ce qu'on a sur le cœur; mais rien d'amer ne vient aggraver le passé, et les propositions les plus conciliantes vont au-devant de l'avenir. Tout ce que Napoléon sait mettre de séduisant dans une conversation, il le met dans celle-ci. De son côté, le saint père l'écoute toujours avec bienveillance, ou lui ré

part et d'autre on se rendait justice, de part et d'autre on prisait les qualités réciproques. Ainsi, le pape á toujours parlé avec la plus grande considération des talens supérieurs de Napoléon, des services qu'il avait rendus à la France,.... à la religion,... de son affection pour lui: car il en avait une véritable... De son côté, Napoléon portait personnellement à Pie VII de vrais sentimens de considération et d'affection. « Je lui ai des obligations; il m'a » sacré : c'est un agneau, un ange de douceur. » Voilà ce que je l'ai cent fois entendu dire de sa bouche. (M. l'abbé de Pradt, t. n des Concordats, p. 227.)

pond avec cette onction paternelle qui le rend si vénérable. La conversation est en italien: san padre, mio figlio, sont les termes dont ils se servent en s'adressant la parole. Tant de confiance et de douce persuasion ne peuvent produire qu'un heureux dénoûment. On ne tarde pas à s'apercevoir qu'on est sur le point de s'entendre, et ce grave entretien est bientôt assaisonné par l'enjouement le plus aimable. Le pape a fini par accepter la résidence d'Avignon. De son côté, Napoléon a écarté des stipulations trop délicates qui paraissent alarmer la conscience du saint père, telle, par exemple, que la cession formelle dés états romains; mais toutes les autres difficultés semblent s'aplanir d'elles - mêmes; et, quant à l'institution canonique des évêques, le pape consent à se renfermer dans le délai que l'église de France a proposé.

On convient de jeter sur le papier les bases du nouveau concordat. Napoléon fait venir un de ses secrétaires et les lui dicte. A chaque article, le saint père approuve de la tête; il semble même prendre quelque plaisir à suivre la plume tachygraphique qui retrace fidèlement une dictée si rapide 1.

· Celui qui écrit ces lignes n'écrit que ce qu'il a vu et entendu; il était là.... Cependant, un écrivain célèbre a

Enfin, avant de se séparer, on convient que les cardinaux et les évêques se réuniront en conseil pour donner au concordat toute la perfection désirable.

Le 25 janvier, après quatre jours de conférence, l'acte étant définitivement arrêté, le pape se rend lui-même dans les appartemens de l'impératrice, qui avait suivi l'empereur à Fontainebleau ; et là, au milieu du cercle le plus brillant, formé de prélats, de militaires, de chambellans, où chacun est heureux de voir la sérénité rétablie enfin sur le front de l'illustre vieillard, on signe le concordat. C'est le cardinal Doria qui, remplissant les fonctions de grand-maître des cérémonies, présente le traité à la signature de l'empereur et du pape; et Napoléon, pour donner à ce cardinal une preuve de sa bienveillance, le décore de l'aigle d'or de la Légion-d'Honneur. La journée du lendemain est encore employée en visites d'amitié, en congratulations réciproques, en distributions de grâces et de faveurs. L'empereur donne le grand aigle de la Légiond'Honneur au cardinal Ruffo; la grande croix de

eu le malheur de faire imprimer quelque part que l'empereur avait osé, dans cette circonstance, frapper de sa propre main le souverain pontife, et traîner le père de l'église par ses cheveux blancs.

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