Page images
PDF
EPUB

ne reste presque plus de moyens de la terminer dans une forme régulière.

Ce qu'il y auroit de mieux à faire sur ce sujet, seroit que la justice n'en entendît plus parler, et que les parties fussent assez sages pour se concilier entr'elles, ou du moins pour s'en rapporter à des commissaires dont elles conviendroient ou que je pommerois d'office, mais cela est peut-être plus aisé à désirer qu'à espérer; cependant, comme la longueur du temps commence à faire impression sur l'esprit de la demoiselle ..... elle me paroît assez disposée à se soumettre à la décision de trois commissaires, pourvu que ce soit moi qui les nomme, et qu'elle n'y contribue en rien. Il s'agiroit donc de savoir si le sieur...... et les autres parties, veulent entrer dans les mêmes vues, et remettre leurs intérêts entre les mains de ceux que je choisirois, et qui seroient autorisés à les régler par un arrêt du conseil. Si vous pouvez savoir ce qu'ils pensent à cet égard, vous prendrez, s'il vous plaît, la peine de me l'écrire, et s'ils consentent à cette proposition, la chose sera bien aisée à régler.

Elle deviendra beaucoup plus difficile, si le sieur..... . . . . . . et autres intéressés, sont résolus à suivre les formes ordinaires; or, en ce cas, il faudra nécessairement qu'eux et la demoiselle...... .. présentent une requête au conseil, dans laquelle ils exposeront les événemens et les circonstances qui empêchent qu'on ne puisse exécuter le premier arrêt tel qu'il a été rendu, et demanderont au roi qu'il lui plaise d'y pourvoir, à l'effet de quoi, ils pourront prendre telles conclusions qu'ils jugeront à propos : c'est ce qu'il faudra aussi que vous preniez la peine de leur faire savoir; et quand ils seront déterminés à l'un ou à l'autre de ces deux partis, je serai en état, sur le compte que vous m'en rendrez, de prendre une dernière résolution sur cette affaire,

Du 7 août 1731.

LES Occupations dont j'ai été accablé pendant mon séjour à Fontainebleau, ne m'ont pas permis de vous faire réponse aussi promptement que je l'aurois désiré, sur le compte que vous m'avez rendu des faits qui portent M. le président ...... à désirer de ne vous avoir pas pour juge.

Sans entrer dans une discussion exacte et détaillée de ces faits, sur lesquels je ne puis mieux faire que de suspendre mon jugement, quand je vois qu'ils sont exposés d'une manière si différente par des magistrats d'ailleurs si dignes de mon estime, je me contenterai de vous dire qu'un aussi bon juge que vous l'êtes, ne sauroit porter trop loin sa délicatesse à ne pas vouloir exercer ses fonctions malgré les suspicions bien ou mal fondées que ce qui s'est passé entre lui et une partie a pu donner lieu de former contre lui.

Je ne saurois douter que vous ne soyez dans ce cas à l'égard de M. le président ......; et pour en être persuadé, je ne m'attache qu'à ce que vous connoissez vous-même par votre lettre et par votre mé

moire.

*

Vous convenez qu'à l'occasion d'un procès que vous aviez à la grand'chambre, vous vous êtes déporté de la connoissance de celui de M. le président......; vous m'assurez, à la vérité, que vous ne vous en êtes déporté que pendant la durée de la contestation où vous étiez partie à la grand'chambre, et où vous avez cessé de l'être peu de temps après; mais, d'un côté, ces sortes de dépôts, de la part d'un juge, ne peuvent être ni conditionnels ni limités à un cretain temps, quand il s'agit du procès à l'occasion duquel ils ont été faits. La confiance ou la défiance ne se divise point, par rapport à une seule et même affaire; et on ne souffre pas dans les véritables règles de l'ordre

public, qu'un juge qui a une fois renoncé à en exercer les fonctions dans un procès où il avoit été récusé, puisse les reprendre à l'égard du même procès, sous prétexte que la cause de la récusation, qui étoit juste quand elle a été proposée, a cessé postérieurement. On peut toujours appréhender que la récusation n'ait laissé, au moins, une plaie légère dans le cœur du juge qui a senti, par là, qu'il étoit suspect à une partie; et quand même cette partie garderoit le silence, il devroit se défendre à lui-même de vouloir être juge dans le procès de celui qui a eu une fois contre lui une suspicion légitime..

Ce qui s'est passé depuis que vous vous êtes déporté, fait encore plus d'impression sur mon esprit. Vous convenez que vous avez prononcé un arrêt sur la redistribution du procès de M......

[ocr errors]

dans le

temps que votre désistement de l'opposition en sous ordre, qui étoit pendante en la grand'chambre, n'étoit pas encore reçu par arrêt, et par conséquent, dans un temps où le procès n'étoit pas entièrement terminé; la cause de la récusation à laquelle vous aviez déposé subsistoit encore. Je présume volontiers que cela vous est échappé par une pure inadvertance, et parce que vous ignoriez alors ce que vous avez appris depuis. Mais il est toujours vrai de dire qu'après vous être déporté de la fonction de juge, et par une raison qui n'avoit pas encore cessé, vous avez exercé cette même fonction à l'égard de la même affaire; c'est une réflexion dont je vous laisse le soin de tirer la conséquence.

J'y en ajoute une dernière prise du désistement même que vous avez fait de l'opposition en sous ordre, qui formoit le procès que vous aviez en la grand'chambre; et je ne saurois m'empêcher de vous dire qu'un désistement placé dans de telles circonstances, et qui a suivi de si près votre déport de la qualité de juge, marque un peu trop le desir de le redevenir malgré celui qui vous avoit récusé. Un magistrat tel que vous, ne doit pas se contenter de faire son devoir dans le fond, il doit respecter sa

réputation presqu'autant que la justice, en évitant de rien faire au dehors qui puisse donner lieu de soupconner, quoique mal à propos, qu'il y a eu dans sa conduite une espèce d'affectation à vouloir demeurer juge aux dépens même d'un intérêt légitime; et il est toujours facheux, en pareil cas, d'être obligé à entrer en justification avec le public, pour faire voir que cet intérêt n'avoit rien de solide.

Ainsi, sans faire aucune discussion des faits purement personnels, comme ce qui s'est passé dans la visite que vous avez reçue de madame la présidente ou d'autres circonstances semblables je crois que toutes sortes de raisons, non-seulement de bienséance, mais de règle, vous obligent à vous abstenir d'être juge du procès de M. le président....; et je suis persuadé que vous le ferez non-seulement par déférence pour ce que je vous écris, mais parce que vous sentirez parfaitement tous les motifs qui doivent vous faire désirer de n'entendre plus parler de cette affaire, après tout ce qui s'y est passé. J'écris la même chose à M. le premier président, à qui je m'étois d'abord adressé pour vous faire part de ce qui m'avoit été exposé sur ce sujet.

Au surplus, vos conjectures ne seroient pas justes,

[ocr errors]

si vous croyez véritablement que c'est par 'M. le président.. que j'ai appris le refus que les avocats font depuis deux ans, ou peut-être plus, d'aller plaider dans votre chambre, et plusieurs autres choses que j'avois touchées en passant, dans ma lettre à M. le premier président. Il y a long-temps que j'en suis informé par des voies non suspectes. Je veux croire que vous n'avez rien à vous reprocher sur tout cela, et l'estime que j'ai pour vous me fait recevoir et interpréter favorablement,, ce que vous me dites en général sur ces faits, qui n'ont aucun rapport avec le procès de M.......; mais j'en serai encore plus convaincu, quand je ne recevrai plus de nouvelles plaintes ou de nouveaux avis sur ce sujet. J'ai été tenté plusieurs fois de vous en écrire; mais, comme ces sortes de faits sont très-difficiles à éclaircir de

loin, et que j'ai d'ailleurs pour principe, de passer quelque chose sur les manières à ceux qui, dans le fond, ont autant de mérite que vous en avez, j'ai cru qu'il valoit mieux vous laisser le soin d'ajouter vous-même aux qualités solides et estimables, que vous avez d'ailleurs, tout ce qui peut les rendre encore plus utiles au public; c'est dans le même esprit que j'ai écrit, comme je l'ai fait, à M. le premier président, et l'affaire de M. le président ...

en a

été l'occasion et non pas le motif. Mais comme vous avez présumé le contraire, vous pouvez sentir que c'est encore une nouvelle raison, qui se joint à toutes celles que je vous ai déjà marquées, pour vous dé terminer à n'être point juge de son procès, et à n'y entrer directement ni indirectement; je vous rends même la justice d'être persuadé que si vous n'aviez pas été déjà résolu à y renoncer absolument, Vous vous seriez bien gardé de m'écrire avec autant de vivacité que vous l'avez fait, sur tout ce qui s'est passé entre vous et ce magistrat.

Du 9 novembre 1731.

J'AI reçu avec un très-grand plaisir la lettre que vous n'avez écrite le 3 de ce mois. Il y a long-temps que je désirois que vous me proposassiez quelque moyen d'avancer l'expédition des procès par écrit, qui n'est pas toujours aussi prompte dans votre compagnie, qu'il seroit à désirer. J'ai été averti plus d'une fois, par des conseillers mêmes, qu'un des plus grands obstacles qu'on trouve à cette expédition, est l'usage qui s'y observe, de donner toujours la parole, par préférence, aux plus anciens conseillers, en sorte que la promptitude du jugement dépend de l'âge ou de l'ancienneté de service du rapporteur, au lieu que, suivant les règles de l'équité, elle devroit dépendre de la nature du procès, et quelquefois même de la misère des parties; mais je n'ai pas besoin de

« PreviousContinue »