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aveux et dénombremens, déclarations à terrier, gages-pleiges, plaids et assises, sont abolis; et il est défendu à tout propriétaire de fiefs de continuer aucuns terriers, gages-pleiges ou plaids et assises commencés avant la publication du présent décret.

6. En attendant qu'il ait été prononcé sur les droits de contrôle, il ne pourra être perçu, pour le contrôle des reconnaissances mentionnées dans l'art. 4, de plus forts droits que ceux auxquels étaient soumis les déclarations à terrier et autres actes abolis par l'art. 5.

7. Toutes saisies féodales et censuelles et droits de commise sont abolis; mais les propriétaires des droits féodaux et censuels non supprimés sans indemnité, pourront exercer les actions, contraintes, exécutions, priviléges et préférences qui, par le droit commun, les différentes coutumes et statuts des lieux, appartiennent à tous premiers bailleurs de fonds.

8. Tous les droits féodaux et censuels, ensemble toutes les rentes, redevances et autres droits qui sont rachetables par leur nature ou par l'effet des décrets du 4 août 1789 et jours suivans, seront, jusqu'à leur rachat et à compter de l'époque qui sera déterminée par l'art. 33 du titre II du présent décrét, soumis pour le principal à la prescription que les différentes lois et coutumes du royaume ont établie, relativement aux immeubles réels ; sans rien innover, quant à présent, à la prescription des arrérages.

9. Les lettres de ratification établies par l'édit du mois de juin 1771, continueront de n'avoir d'autre effet sur les droits féodaux et censuels, que d'en purger les arrérages, jusqu'à ce qu'il ait été pourvu par une nouvelle loi à un régime uniforme et commun à toutes les rentes et charges foncières pour la conservation des priviléges et hypothèques.

10. Le retrait féodal, le retrait censuel, le droit de prélation féodale ou censuelle, et le droit de retenue seigneuriale, sont abolis.

11. Tous priviléges, toute féodalité et nobilité de biens sont détruits; les droits d'aìnesse et de masculinité à l'égard des fiefs, domaines et alleux nobles; et les partages inégaux à raison de la qualité des personnes, sunt abolis. En conséquence, toutes les successions, tant directes que collatérales, tant mobilières qu'immobilières, qui écherront, à compter du jour de la publication du présent, seront, sans égard à l'ancienne qualité noble des biens et des personnes, partagées entre les héritiers, suivant les lois, statuts et coutumes qui règlent les partages entre tous les citoyens; toutes lois et coutumes à ce contraires sont abrogées et détruites. - Seront exceptés ceux qui sont actuellement mariés ou veufs avec enfans, lesquels, dans les partages à faire entre eux et leurs cohéritiers de toutes les successions mobilières et immobilières, directes et collatérales, qui pourront leur échoir, jouiront de tous les avantages que leur attribuent les anciennes lois. Les puînés et les filles, dans les coutumes où ils ont eu jusqu'à présent sur les biens tenus en fief plus d'avantage que sur les biens non féodaux, continueront de prendre dans les ci-devant fiefs les parts à eux assignées par lesdites coutumes, jusqu'à ce qu'il ait été déterminé un mode définitif et uniforme de succession pour tout le royaume (1).

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(1) L'enfant d'un aîné dont le père est mort avant la présente loi, mais qui était lui-même marié ou veuf antérieurement à sa publication, exerce par représentation les droits d'aînesse et les avantages que les lois conféraient aux mariés ou veufs sans enfans. Cass., 26 floréal an 11; Bull. civ., V, 258 -STR., III, 2, 325.

Le droit de masculinité n'est pas maintenu en faveur du frère du défunt, au préjudice de sa fille héritière : ce n'est pas là un avantage cutre cohéritiers. Cass. 3 juin 1823; Bull. civ., XXV, 249; SIR., XXIII, 1, 271.

12. La garde royale, la garde seigneuriale et le déport de minorité sont abolis.

13. Sont pareillement abolis tous les effets que les coutumes, statuts et usages avaient fait résulter de la qualité féodale ou censuelle des biens, soit par rapport au douaire, soit pour la forme d'estimer les fonds, et généralement pour tout autre objet, quel qu'il soit; sans néanmoins comprendre dans la présente disposition, en ce qui concerne le douaire, les femmes actuellement mariées ou veuves, et sans rien innover, quant à présent, aux dispositions des coutumes de nantissement, relativement à la manière d'hypothéquer et d'aliéner les héritages; lesquelles continueront, ainsi que les édits et déclarations qui les ont expliquées, étendues ou modifiées, d'être exécutées suivant leur forme et teneur, jusqu'à ce qu'il en ait été autrement ordonné (1).

TITRE II.

- Des Droits seigneuriaux qui sont supprimés sans indemnité.

Art. 1er La main-morte personnelle, réelle ou mixte, la servitude d'origine, la servitude personnelle du possesseur des héritages tenus en mainmorte réelle, celle de corps et de poursuite, les droits de taille personnelle, de corvées personnelles, d'échute, de vide-main; le droit prohibitif des aliénations et dispositions à titre de vente, donation entre-vifs ou testamentaire, et tous les autres effets de la main-morte réelle, personnelle ou mixte, qui s'étendaient sur les personnes ou les biens, sont abolis sans indemnité.

2. Néanmoins, tous les fonds ci-devant tenus en main-morte réelle ou mixte continueront d'être assujettis aux autres charges, redevances, tailles ou corvées réelles dont ils étaient précédemment grevés.

3. Lesdits héritages demeurent pareillement assujettis aux droits dont ils pouvaient être tenus en cas de mutation par vente, pourvu néanmoins que lesdits droits ne fussent pas des compositions à la volonté du propriétaire du fief dont ils étaient mouvans, et n'excédassent point ceux qui ont accoutumé être dus par les héritages non main-mortables tenus en censive dans la même seigneurie, ou suivant la coutume.

4. Tous les actes d'affranchissement par lesquels la main-morte réelle ou mixte aura été convertie, sur les fonds ci-devant affectés de cette servitude, en redevances foncières et en droits de lods aux mutations, seront exécutés selon leur forme et teneur; à moins que lesdites charges et droits de mutations ne se trouvassent excéder les charges et droits usités dans la même seigneurie, ou établis par la coutume ou l'usage général de la province, relativement aux fonds non main-mortables tenus en censive.

5. Dans le cas où les droits et charges réelles mentionnés dans les deux articles précédens se trouveraient excéder le taux qui est indiqué, ils y seront réduits; et sont entièrement supprimés les droits et charges qui ne sont représentatifs que de servitudes purement personnelles.

6. Seront néanmoins les actes d'affranchissement faits avant l'époque fixée par l'art. 33 ci-après, moyen ant une somme de deniers, ou pour l'abandon d'un corps d'héritage certain, soit par les communautés, soit par les particuliers, exécutés suivant leur forme et teneur.

7. Toutes les dispositions ci-dessus concernant la main-morte auront également lieu en Bourbonnais et en Nivernais pour les tenures en bordelage, et en Bretagne pour les tenures en mote et en quevaise : à l'égard des tenures en domaines congéables, il y sera statué par une loi particulière.

(1) Voir le décret du 20-27 septembre 1790.

8. Les droits de meilleur cartel ou morte-main, de taille à volonté, de taille ou d'indire aux quatre cas, de cas impérieux et d'aide seigneuriale, sont supprimés sans indemnité.

9. Tous droits qui, sous la dénomination de feu, cheminée, feux allumans, feu mort, fouage, monéage, bourgeoisie, congé, chiennage, gîte aux chiens, ou autre quelconque, sont perçus par les seigneurs sur les personnes, sur les bestiaux, ou à cause de la résidence, sans qu'il soit justifié qu'ils sont dus, soit par les fonds invariablement, soit pour raison de concessions d'usages ou autres objets, sont abolis sans indemnité.

10. Sont pareillement abolis sans indemnité les droits de guet et de garde, de chassipolerie ensemble les droits qui ont pour objet l'entretien des clôtures et fortifications des bourgs et des châteaux, ainsi que les rentes ou redevances qui en sont représentatives, quoique affectées sur des fonds, s'il n'est pas prouvé que ces fonds ont été concédés pour cause de ces rentes ou redevances;-Les droits de pulvérage levés sur les troupeaux passant dans les chemins publics des seigneurs; - Les droits qui, sous la dénomination de banvin, vet-du-vin, étanche ou autre quelconque, emportaient pour un seigneur la faculté de vendre seul et exclusivement aux habitans de sa seigneurie, pendant un certain temps de l'année, ses vins ou autres boissons et denrées quelconques.

11. Les droits connus en Auvergne et autres provinces sous le nom de cens en commande; en Flandre, en Artois et en Cambresis, sous celui de gave, gavenne ou gaule; en Hainaut, sous celui de poursoin; en Lorraine, sous celui de sauvement ou sauve garde; en Alsace, sous celui d'avoueric ; et généralement tous les droits qui se payaient ci-devant, en quelque lieu du royaume et sous quelque dénomination que ce fût, en reconnaissance et pour prix de la protection des seigneurs, sont abolis sans indemnité; sans préjudice des droits qui, quoique perçus sous les mêmes dénominations, seraient justifiés avoir pour cause des concessions de fonds.

12. Les droits sur les achats, ventes, importations et exportations de biens meubles, de denrées et de marchandises, tels que les droits de cinquantième, centième ou autre denier du prix des meubles ou bestiaux vendus, les lods et ventes, treizième et autres droits sur les vassaux, sur les bois et arbres futaies, têtards et fruitiers, coupés ou vendus pour être coupés, sur les matériaux des bâtimens démolis ou vendus pour être démolis; les droits d'accise sur les comestibles, le droit de Leyde ou dîme sur les poissons, les droits de bouteillage, de wingeld ou autres sur les vins et autres boissons, les impôts et billots seigneuriaux et autres de même nature, sont abolis sans indemnité (1).

13. Les droits de péage, de long et de travers, passage, halage, pontonage, barrage, châmage, grande et petite coutume, tonlieu, et tous autres droits de ce genre, ou qui en seraient représentatifs, de quelque nature qu'ils soient et sous quelque dénomination qu'ils puissent être perçus, par terre ou par eau, soit en matière, soit en argent, sont supprimés sans indemnité; en conséquence, les possesseurs desdits droits sont déchargés des prestations pécuniaires et autres obligations auxquelles ils pouvaient être assujettis pour raison de ces droits (2).

(1) Le droit de bouteillage et tous autres de cette nature existant en Bretagne, ont été supprimés par un décret du 18-28 août 1792.

(2) C'est aux tribunaux et non à l'autorité administrative qu'il appartient de décider si un droit de péage concédé à un particulier était féodal ou non. Arrêt du cons. d'état du 5 septembre 1820; Mac., II., 364.

Et, en général, les tribunaux sont compétens, à l'exclusion de l'administration, pour décider ce

14. Il sera pourvu par les assemblées administratives à l'entretien des ou vrages dont quelques-uns desdits droits sont grevés.

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15. Sont exceptés, quant à présent, de la suppression prononcée par l'art. 13,- 1o Les octrois autorisés qui se perçoivent sous aucune des dénominations comprises dans ledit article, soit au profit du trésor pnblic, soit au profit des provinces, villes, communautés d'habitans ou d'hôpitaux ; — 2o Les droits de bac et de voiture d'eau; -3° Ceux des droits énoncés dans ledit article qui ont été concédés pour dédommagement de frais de construction de canaux et autres travaux ou ouvrages d'art construits sous cette condition; 4o Les péages accordés à titre d'indemnité à des propriétaires légitimes de moulins, usines ou bâtimens et établis semens quelconques supprimés pour raison de l'utilité publique.

-

16. Tous les droits exceptés par l'article précédent continueront provisoirement d'être perçus suivant les titres et tarifs de leur création primitive, reconnus et vérifiés par les départemens des lieux où ils se perçoivent, jusqu'à ce que, sur leur avis, il ait été statué définitivement à cet égard; et, à cet effet, les possesseurs desdits droits seront tenus, dans l'année, à compter de la publication du présent décret, de représenter leurs titres auxdits dépar temens; à défaut de quoi les perceptions demeureront suspendues.

17. Les droits d'étalonnage, minage, muyage, menage, leude, Leyde, puginère, bichenage, levage, petite coutume, sexterage, coponage, copel, coupe, cartelage, stellage, sciage, palette, aunage, étale, étalage, quintalage, poids et mesures, et autres droits qui en tiennent lieu, et généralement tous droits, soit en nature, soit en argent, perçus sous le prétexte de poids, mesures, marque, fourniture ou inspection de mesures, ou mesurage de grains, grenailles, sel, et toutes autres denrées ou marchandises, ainsi que sur leur étalage, vente ou transport dans l'intérieur du royaume, de quelque espèce qu'ils soient, ensemble tous les droits qui en seraient représentatifs, sont supprimés sans indemnité; sans préjudice néanmoins des droits qui, quoique perçus sous les mêmes dénominations, seraient justifiés avoir pour cause des concessions de fonds.

18. Les étalons, matrices et poinçons qui servaient à l'étalonnage des poids et mesures, seront remis aux municipalités des lieux, qui en paieront la valeur et pourvoiront à l'avenir gratuitement à l'étalonnage et vérification des poids et mesures.

19. Les droits connus sous le nom de coutume, hallage, havage, cohue, et généralement tous ceux qui étaient perçus en nature ou en argent, à raison de l'apport ou du dépôt des grains, viandes, bestiaux, poissons, et autres denrées et marchandises, dans les foires, marchés, places ou halles, de quelque nature qu'ils soient, ainsi que les droits qui en seraient représentatifs, sont aussi supprimés sans indemnité; mais les bâtimens et halles continueront d'appartenir à leurs propriétaires, sauf à eux à s'arranger à l'amiable, soit pour le loyer, soit pour l'aliénation, avec les municipalités des lieux; et les difficultés qui pourraient s'élever à ce sujet seront soumises à l'arbitrage des assemblées administratives (1).

qui est supprimé comme féodal. Arrêts du cons. d'état des 30 mai 1821 (Mac., I, 62 ), 8 mai 1822 (le même, III, 392), 26 février et 12 novembre 1823 (le même, V, 164 et 771), 24 mars 1824 (le même,, VI, 168)..

Le particulier qui s'est obligé d'entretenir un pont à la décharge d'un ci-devant seigneur, est affranchi de son obligation, l'abolition du péage ayant pour effet d'éteindre celle du seigneur, Colmar, 27 mars 1806; SIR, VI, 2, 983.

Le droit de pontage n'est aboli qu'au préjudice du seigneur; celui perçu par une commune est maintenu. Cass., 26 germinal an 7, Bull. civ., 1, 328, SIR., I, 1, 205.

(1) Les droits de halles ou de boucheries perçus par le roi sur un sol qu'il tenait, non comme

20. N'est pas compris, quant à présent, dans la suppression prononcée par l'article précédent le droit de la caisse des marchés de Sceaux et de Poissy.

21. En conséquence des dispositions des art. 18 et 19, le mesurage et poids des farines, grains, denrées et marchandises dans les maisons particu-· lières, sera libre dans toute l'étendue du royaume, à la charge de ne ponvoir se servir que de poids et mesures étalonnés et légaux; et quant au service des places et marchés publics, il y sera pourvu par les municipa lités des lieux, qui, sous l'autorisation des assemblées administratives, fixeront la rétribution juste et modérée des personnes employées au pesage et mesurage.

22. Tous droits qui, sous prétexte de permission donnée par les seigneurs pour exercer des professions, arts ou commerces, ou pour des actes qui, par le droit naturel et commun, sont libres à tout le monde, sont supprimés sans indenmité.

23. Tous les droits de banalité de fours, moulins, pressoirs, boucheries, taureaux, verrats, forges et autres, ensemble les sujétions qui y sont acces→ soires, ainsi que les droits de verte-moute et de vent, le droit prohibitif de la quête-mouture ou chasse des meuniers, soit qu'ils soient fondés sur la coutume ou sur un titre acquis par prescription, ou confirmés par des jugemens, sont abolis et supprimés sans indemnité, sous les seules exceptions ci-après (1).

24. Sont exceptés de la suppression ci-dessus, et seront rachetables,1o Les banalités qui seront prouvées avoir été établies par une convention souscrite entre une communauté d'habitans et un particulier non seigneur;

2o Les banalités qui seront prouvées avoir été établies par une convention souscrite par une communauté d'habitans et son seigneur, et par laquelle le seigneur aura fait à la communauté quelque avantage de plus que de s'obliger à tenir perpétuellement en état les moulins, fours ou autres objets banaux ; —3° Celles qui seront prouvées avoir eu pour cause une concession faite par le seigneur à la communauté des habitans, de droits d'usage dans ses bois ou prés, ou de communes en propriété.

25. Toute redevance ci-devant payée par les habitans, à titre d'abonne→ ment de banalités, de la nature de celles ci-dessus supprimées sans indemnité, et qui n'étaient point dans le cas des exceptions portées par l'article précédent, est abolie et supprimée sans indemnité.

26. Il est fait défense aux ci-devant baniers d'attenter à la propriété des

propriétaire, mais comme seigneur, sont abolis. Arrêt du conseil du 16 mars 1807; Jur. du cons., 1, 62.

Les rentes pour concession de bancs sons les halles ne sont pas féodales de leur nature. Arrêt du cons. du 4 août 1817; SIR., XVII, 2, 148.

Les propriétaires de halles ne peuvent être dépossédés par les communes que moyennant une indemnité préalable. Décret du 26 mars 1814 ; Jur. du cons., II, 533: ordonnance du 2, 30 juin 1819; même recueil, V, 135.

Les contestations sur la propriété des halles et la fixation de l'indemnité due au propriétaire dépossédé, sont de la compétence des tribunaux et non de l'administration. Arrêt du cons. d'état, 22 février 1821; Jur. du cons., V, 542.

(1) Les bannalités conventionnellement établies entre les communes et les particuliers non scigneurs, ne sont pas abolies. Cass., 7 frimaire an 13: Bull. civ., VII, 55 ; SIR., V, 2. 57. Cass., 5 février 1816; ŠIR., XVI, 1, 157.

Les lois abolitives du régime féodal n'ont pas porté atteinte aux concessions faites par les cidevant seigneurs, des droits de cours d'eau des ruisseaux ou petites rivières existant dans leurs seigueuries. Cass., 23 ventose an 10; SIR., II, 2, 416.

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