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talons, ou dans les deux à la-fois, et il survient un boursouflement de chair fongueuse qui ressemble à un fic ou poireau ; il se manifeste un suintement ulcéreux, fétide, accompagné de douleurs plus ou moins considérables, qui fait boiter l'animal tout bas, quand il n'est affecté que d'un pied à-la-fois et dans les deux sabots; mais s'il n'y a qu'un côté, ou un seul doigt malade, l'animal boite beaucoup moins, parce qu'il peut encore s'appuyer sur le doigt qui n'est pas attaqué.

Il est aisé de voir quand un doigt est pour être atteint de ce mal; le sabot s'allonge prodigieusement; d'autres fois il se jette en dedans ou en dehors; de-là les douleurs qu'éprouve l'animal en appuyant son pied sur le sol. De ce faux aplomb résultent aussi des tiraillemens, des pincemens qui font détacher le sabot de part et d'autre, soit à la face interne, soit à la face externe, mais le plus habituellement aux talons.

L'ulcère qui naît de ce mal n'a point de siège fixe tantôt il se manifeste au bord interne et au bout de l'arc-boutant vers la pince; quelquefois il prend naissance dans le centre du pied, sous la sole; mais le plus ordinairement, c'est vers le talon que cet ulcère com

mence à paraître. L'inflammation que ce mal produit est si forte, elle devient si considérable, que le pied en est promptement endommagé dans toute son étendue : l'animal alors est triste, il a une fièvre plus ou moins forte, selon la douleur qu'il ressent; il cherche souvent à boire, et mange moins que dans l'état de santé.

S'il arrive que les deux pieds antérieurs soient attaqués à-la-fois, les moutons vont à genoux ; la fièvre augmente, les douleurs sont plus aiguës, la tristesse est plus grande, et ils sont dévorés par une soif ardente qui leur survient avec la perte de l'appétit.

Lorsque ce sont les pieds postérieurs qui se trouvent affectés, l'animal a le soin d'engager les membres antérieurs sous le centre de son corps, afin de soulager par-là ceux qui sont plus ou moins malades: dans ce cas, le mouton marche la tête baissée; quelquefois il se met aussi à genoux pour adoucir les maux des membres attaqués; d'autres fois encore, il se couche à chaque instant. Quelque grande que soit la souffrance de ces animaux dans cette situation, elle n'est rien encore auprès de celle qu'ils éprouvent quand les deux pieds de droite ou de gauche sont affectés, qu'il y en a

trois, ou quelquefois même quatre malades; ils font pitié à voir; leurs douleurs sont si fortes, qu'ils ne peuvent plus ni marcher, ni se tenir en aucune manière; s'ils essaient à le faire, ils semblent marcher sur des épines, ils ont les quatre jambes ramassées sous le corps, le dos en contre haut, et ils tombent à tout moment. C'est dans cette pénible situation qu'on découvre les symptômes que j'ai cités; qu'on les voit augmenter d'intensité. Alors les animaux dépérissent à vue d'œil si l'on ne s'empresse de leur porter des secours. Une fièvre violente les abat tellement, qu'ils ne peuvent plus se lever; leurs flancs battent, s'agitent, leur figure devient terne, le nez se retire, et tout annonce l'anéantissement lorsque les quatre pieds sont malades à-la-fois.

Les douleurs sont encore beaucoup plus vives dans le principe du mal, que lorsqu'il y a long-temps que les bêtes en sont attaquées; néanmoins j'ai vu des moutons en qui la corne d'un des deux pieds, quelquefois même des quatre, était si bien désunie de la sole de chair et des feuillets, qu'on s'apercevait à peine s'ils étaient boiteux.

Il est des animaux chez lesquels il se forme un écoulement de matière fétide, mais qui ne

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paraît que dans la fourchette, sans porter plus loin ses ravages. Cet écoulement est ce que les bergers appellent communément fourchette échauffée ou mal-blanc. Il se manifeste par des ravages plus ou moins grands; la matière pénètre dans les feuillets qui unissent la corne à l'os du pied; et, lorsque cette matière est ancienne, il n'est pas extraordinaire que l'os et l'articulation en soient offensés. Toute la sole se décompose alors; elle devient spongieuse, et s'arrache au moindre tiraillement. Si l'os et l'articulation sont endommagés, l'animal souffre considérablement, et ne peut se servir d'aucune des extrémités affectées.

A cet écoulement d'humeur sanieuse et fétide, il se joint, pour l'ordinaire, un engorgement squirreux de nature toute particulière, plus ou moins fort, existant dans les tissus vasculaires et cellulaires qui unissent la paroi à l'os du pied. Alors le pied s'enfle, devient le double plus gros que son pareil; ses fibres deviennent filamenteuses, se séparent et s'allongent en forme de pinceau. Le suintement naît ensuite et devient de plus en plus fétide; l'ulcération envahit tout le tissu vasculaire et cellulaire du pied entier, et on voit bientôt le sabot se soulever, l'ongle se dessécher dans 2o Coll.-3.

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toute son étendue, et finir quelquefois par tomber de lui-même.

Cet engorgement de la nature du carcinome est très-dur; on remarque à travers les tissus quantité de rayons blancs dans la longueur des feuillets, qui sont plus ou moins larges, selon que l'engorgement est plus ou moins volumineux ces rayons ne doivent être considérés que comme un épanchement d'humeur lymphatique; il s'y rencontre, parfois, du sang desséché tel que dans les bleimes: ces rayons alors sont grisâtres, rougeâtres, etc. La corne qui recouvre cet engorgement est bosselée, très-dure; coupée, elle est blanche comme du papier dans son intérieur, parce qu'elle ne reçoit plus de nourriture de la part des feuillets. De pareils engorgemens ont toujours lieu dans le côté externe et sous le quartier du sabot. Il y a un point de supuration à la face interne dans quelques-uns, soit à la pince, soit sous la pointe de l'arc-boutant qui correspond au centre interne du pied.

Tous ces progrès augmentent la douleur, celle-ci accroît la boiterie; toute la partie inférieure se trouve engorgée : le bourrelet, la couronne sont tuméfiés, et quelquefois compri-' més par la paroi, desséchée alors et resserrée

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