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objet des fruits proprement dits, mais des produits irréguliers et aléatoires.

De tous temps les produits des mines ont été réputés des fruits industriels, c'est pourquoi la mine peut être louée. Le droit romain rangeait déjà les mines parmi les fruits (').

Le code civil a suivi cet exemple (art. 547, 582, 598 et 1403). Les discussions de la loi sur les mines de 1810 réfléchissent la même pensée (2).

La redevance due par la mine est d'ailleurs perpétuelle, comme la propriété de la miue elle-mème (loi du 21 avril 1810, artiele 7); il est indifférent que l'objet auquel s'applique le droit doive périr un jour.

En supposant même que la redevance ne soit pas perpétuelle, il suffit qu'elle ait une durée de plus de 99 ans, pour qu'elle soit remboursable aux termes de l'art. 1er du décret du 18 décembre 1790.

L'arrêt dénoncé commet une autre erreur lorsqu'il reproche à la redevance de n'être pas périodique.

Dans l'espèce, la redévance s'acquiert comme le champart à fur et à mesure de l'exploitation, mais le terme de payement est semestriel, aux termes de l'acte de 1715.

La société rend les comptes et paye le solde tous les six mois.

Du reste, il y a chose jugée sur la périodicité du payement par l'arrêt du 6 mai 1848, arrêt qui a admis la prescription quinquennale des termes arriérés.

Peu importe d'ailleurs que la redevance soit variable ou invariable, en nature ou en argent le champart aussi est variable, et il est frappé par les défenses des décrets de 1789 et 1790.

Si ces décrets, ainsi que le prétend la cour d'appel, ne s'expliquent pas sur le mode et le taux du rachat d'une redevance sur l'exploitation d'une mine, il n'en faut point conclure que les principes généraux édictés par les décrets ne sont pas applicables à telle redevance, mais seulement que ce taux sera déterminé par les tribunaux d'après les règles du droit commun.

Aussi recourt-on par analogie aux dispositions des décrets précités, lorsqu'il s'agit du rachat de rentes créées postérieurement à ces décrets, et auxquelles leurs

(1) Voy. Troplong, Louage, no 93; Brux., cass., 2 juillet 1849; L. 7, § 10, Dig. 1. 24, tit. 3.

(2) Séance du conseil d'Etat du 20 juin 1809; Loeré, tome 4, page 287; Brux., cass, 20 avril

dispositions ne sont pas textuellement applicables.

En vain la cour d'appel comparerait le droit des défendeurs à ceux qui naissent des contrats de société, du louage ou de la copropriété, droits d'une nature essentiellement différente.

La remise à forfait, qui est un véritable bail, diffère aussi du tout au tout de la locatairerie perpétuelle qui emporte aliénation de la propriété. Le raisonnement de la cour d'appel manque donc encore d'exactitude sous ce rapport.

L'arrêt attaqué invoque aussi à tort l'article 55 de la loi du 21 avril 1810. Cet article a en vue les difficultés administra tives relatives à la délimitation des mines. Les défendeurs au surplus ne sont pas propriétaires de la surface, et l'art. 55 s'adresse aux anciens droits des exploitants ou des propriétaires antérieurs à 1791.

Enfin, c'est sans fondement que la cour d'appel conteste l'analogie qui existe entre la redevance actuelle et celle créée par les articles 6, 18 et 42 de la loi du 21 avril 1810, la proportionnalité ne pouvant être ici d'aucune considération.

-

Réponse des défendeurs. Le pour n'est ni recevable, ni fondé. Non recevable : en effet, aux termes de l'art. 8 du règlement du 15 mars 1815, la requête en cassation doit contenir: 1o un exposé sommaire des moyens; 2° l'indication des lois qu'on prétend avoir été violées.

A la vérité, l'art. 11 du règlement permet au demandeur de produire, dans la quinzaine de son pourvoi, un mémoire ampliatif. Mais ce mémoire ue peut que développer les moyens, il ne peut pas les suppléer (3).

La requête déposée au greffe dans l'espèce ne satisfait en aucune manière à la première des conditions exigées par le règlement de 1815.

La requête invoque une longue série de dispositions fort diverses, mais elle ne précise en aucune manière le rapport de ces dispositions à l'espèce, ni en quoi chacune d'elles aurait été violée par l'arrêt attaqué. -En présence d'indications si implicites, si peu nettes, les défendeurs ne pouvaient comprendre la portée du pourvoi ni y défendre. La demanderesse ne précise point quelle

1849 (Belgique judiciaire, tome 7, page 1569). (3) Voy. Brux., cass, 16 février 1855 (ec Recueil, 1835, 1, 285); 10 févr. 1842 (id., 1842, 1, 210); 5 févr. et 17 juin 1843 (id., 1845, 1, 45 et 273)

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est la chose jugée qui aurait été violée. Cependant dix-neuf décisious judiciaires sont intervenues entre les parties: il fallait indiquer celle qui aurait été méconnue. A cet égard tout au moins, le pourvoi devrait donc être déclaré non recevable.

Le pourvoi est aussi non fondé.

Placée

en présence des décrets de 1789 et 1790 d'une part, et de la transaction de 1803 d'autre part, la cour de Bruxelles avait à se demander, quelle était la nature du droit constitué par cette convention, si ce droit était une redevance ou rente foncière ou un champart.

Appréciant les conventions qui lient les parties, la cour d'appel reconnaît et constate que le droit spécial dont il s'agit n'est pas une rente ou redevance foncière, mais un droit sui generis, complétement différent de la rente ou redevance foncière, trop différent pour pouvoir leur être assimilé ; que ce droit s'applique à une chose entièrement distincte et indépendante du domaine de la surface; qu'il s'exerce sur l'objet même qui a formé la matière de l'engagement, dès l'instant où le corps certain qui le constitue est tiré au jour; qu'en ce qui le concerne tout est aléatoire, chanceux, incertain et souvent conjectural, que l'on ait égard soit aux époques, soit aux produits de l'extraction, soit à la possibilité même de l'extraction; que ce droit se trouve tellement lié au sort de la mine qu'il doit subir toutes les conséquences de son exploitation.

La cour d'appel juge et apprécie ainsi en fait, et cette appréciation échappe à la censure de la cour de cassation; au surplus le caractère du droit des défendeurs étant ainsi déterminé, les décrets de 1789 et 1790 étaient évidemment inapplicables et n'ont pu dès lors être violés.

Si, surabondamment après la décision du juge du fond, on examine quelle est en effet la nature du droit des défendeurs, on trouvera encore qu'il est essentiellement différent de la rente foncière.

D'après la doctrine de Pothier, et d'après l'article 530 du code civil, pour qu'il y ait rente foncière il faut : 1° cession d'un droit immobilier dont la rente est le prix ; 2o rente annuelle en argent ou en fruits, constituant l'intérêt ou le produit annuel du capital; 3o rente établie à perpétuité, distincte du capital qui produit les redevances, sans s'éteindre par le payement de celles-ci; 4o redevance dont le payement est dû à jour fixe, à part toute production de fruits par l'immeuble qu'elle grève.

Le droit des défendeurs ne présente aucun de ces caractères :

1o Les défendeurs ont cédé non un immeuble, mais le droit d'extraire de leur sol une chose découverte sur laquelle ils ont un droit de propriété, cession faite non pour une redevance annuelle, mais pour un prix unique, le dix-huitième de la mine trouvée, payable successivement à fur et à mesure de la mise au jour;

2o Le droit des défendeurs n'a point pour objet la redevance périodique d'un capital; leur droit à chaque payement ne naît que quand la mine sur laquelle il porte apparaît au jour, il s'exerce sur l'objet même qui a formé la matière de l'engagement. Il y a là un prix principal d'une chose mobilière payable à fur et à mesure de la réalisation d'une condition;

3° La redevance due aux défendeurs n'est point perpétuelle; l'extinction de leur droit est fatalement marquée à l'avance. Par cela même qu'il s'applique à une chose distincte de la surface, il doit nécessairement finir avec cette chose. Le jour où il n'y aura plus de charbon à extraire, et ce jour se rapproche nécessairement, le droit des défendeurs s'anéantira;

4o Dans l'espèce, il y a absence de périodicité. Le droit des défendeurs dépend d'un événement futur et incertain : l'extraction. Cet événement doit se renouveler pour chaque payement, qui se trouve ainsi complétement isolé et indépendant des autres; le droit est acquis à chaque moment, pour chaque fait d'exploitation et non par un retour périodique quelconque.

Le pourvoi soutient qu'en écartant la périodicité, la cour d'appel aurait violé la chose jugée par l'arrêt du 6 mai 1848.

Mais il suffit de lire cet arrêt, qui du reste n'a de valeur qu'au point de vue de la prescription (') qu'il admet, pour se convaincre qu'il ne considère qu'une chose, c'est que, s'il y a des payements à faire ils doivent se faire tous les six mois; mais il ne dit nullement qu'il y ait quelque chose à payer tous les six mois.

Cet arrêt, de même que celui de 1812 qui a maintenu comme licite l'acte de 1803, ne statue donc en aucune façon sur la question

(1) Pour la question de prescription, voy., du reste, un arrêt de la cour de Liége du 21 déc. 1850 (Pasic., 1851, 2, 192), en matière de cens d'areine. Voy. aussi Répertoire de Brixhe, vo Areine, nes 122 et 112, p. 94 et 77.

de rédimibilité, la seule engagée dans le dé- de commun avec le droit des défendeurs. bat actuel.

Le pourvoi cherche également à tirer parti de l'analogie existant prétenduement entre le droit des défendeurs et le champart.

Mais le champart n'est qu'une espèce de rente (Pothier, Bail à rente, no 13). Il est le prix de la cession d'un droit immobilier.

Le droit consiste, non pas, comme dans l'espèce, dans une partie de la chose donnée à bail, mais dans une partie des fruits de cette chose.

Le droit de champart est périodique. C'est à une certaine époque que tous les ans les fruits se reproduisent, et l'absence de produit ne saurait être que l'exception. champart enfin est perpétuel.

Le

Cependant, malgré les analogies entre le champart et la rente, le décret de 1790 a par une disposition formelle étendu la faculté de rachat au champart.

L'on ne saurait donc admettre que le législateur aurait implicitement compris dans ses dispositions le droit si différent dont il s'agit dans l'espèce.

Le pourvoi confond la prestation, dont parle la transaction de 1803, avec une rede

vance.

Toute redevance à la vérité est une prestation, mais toute prestation n'est pas une redevance.

La redevance emporte l'idée de périodicité, il n'en est pas de même de la prestation.

Inutile de faire observer que si l'arrêt décide que le droit dans l'espèce n'était pas rachetable, ce n'est nullement parce que la transaction de 1803 aurait dérogé aux lois de 1789 et 1790, mais parce qu'il ne s'agissait pas de l'un des droits qui font seuls l'objet de cette loi.

Le droit tout spécial des défendeurs, ué en 1803, n'a pu en aucune façon être régi par les chartres du Hainaut.

El ce n'est pas avec plus de raison que le pourvoi allègue que l'arrêt attaqué tendrait à déclarer irrachetables toutes rentes postérieures à 1790. L'arrêt considère simplement comme échappant à l'application des lois de 1789 et 1790 les prestations qui ne se prêtent aucunement au mode de rachat prescrit par ces décrets.

Enfin, l'on ne voit pas ce que la redevance due aux propriétaires de la surface (loi du 21 août 1810, art. 6, 18 et 42) peut avoir

M. le premier avocat général Faider, sans s'arrêter aux fins de non-recevoir opposées au pourvoi, a conclu au rejet dans les termes suivants :

Le fond du débat nous paraît devoir être discuté, parce que la cour a réellement à décider si la prestation due par la société défenderesse est rachetable; il y a là à résoudre une véritable question de droit, question, suivant nous, fort simple et fort justement décidée dans le sens négatif tant par le tribunal de Mons que par la cour d'appel de Bruxelles.

«Nos conclusions tendant au rejet, nous ne nous arrêterons pas aux deux points préalables posés et discutés dans le mémoire en réponse; nous dirons en peu de mots notre avis sur la question du rachat de la redevance.

« Qu'ont voulu les parties dans la transaction de 1803? Éteindre une contestation sur la nature féodale ou foncière de la redevance ou du droit d'entrecens réservé lors de la concession de 1715: ce qui caractérise la transaction, c'est-à-dire les conventions conciliatrices des parties, c'est la réduction de la onzième à la dix-huitième partie du produit brut de la mine. Ce qui est de l'essence de cette convention comme de la volonté des parties, c'est de reconnaître aux auteurs des défendeurs un droit invariable et déterminé dans les produits de la mine tant qu'elle serait ou pourrait être exploitée, et en cas d'exploitation non interrompue, lant que la mine ou la masse de matière minérale concédée dans un périmètre déterminé subsisterait; en d'autres termes, jusqu'à épuisement.

«Nous ne faisons ici aucune difficulté de reconnaître dans l'essence de la convention en débat, dans l'essence du droit des défendeurs, une sorte de perpétuité. — Cette perpétuité ne s'entend pas d'un fait éternel et saus fin; elle s'entend d'une durée indéfinie en rapport avec la chose à laquelle elle s'attache: ainsi, dans notre espèce, le droit sur la mine est perpétuel, en rapport avec la perpétuité ou la durée indéterminée et possible de la mine, c'est-à-dire, nous le répétons, jusqu'à épuisement de la matière même de la transaction. Mais cette perpétuité contingente est bien différente de la perpétuité absolue qui pesait sur les charges ou rentes foncières déclarées rachetables par la constituante.

« Si l'essence de la convention et si la volonté des parties consacrent cette perpé

tuité, comment comprendre qu'elle puisse être rompue et effacée par la volonté de l'une des parties, sans l'accord nouveau de tous les intéressés ? Cela est absolument, clairement inadmissible.

« Pour qu'en l'absence d'une convention sur le remboursement, la convention permise pût être modifiée dans son essence, pour que le rachat d'une redevance qualifiée comme celle de 1803, fût considérée comme possible, il faudrait une loi qui l'autorisât. Cette loi devrait non-seulement autoriser ce rachat, elle devrait le régler, en fixer le conditions, en calculer les bases, déterminer l'équitable remboursement en rapport avec la valeur de la chose ou de l'intérêt que devrait représenter le capital de remboursement

Une telle loi n'existe pas ; une telle loi appliquée au remboursement d'une part dans le produit brut d'une mine serait presque impossible à faire à priori, parce qu'elle manquerait d'une base de calcul et d'une assiette de valeur; les chances diverses qui accompagnent l'exploitation des mines et les variations parfois si notables dans les produits, offriraient d'insurmontables obstacles au législateur pour ordonner et régler le rachat des redevances ou des participations.

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« Les décrets des 4 août 1789 et 18-29 déceinbre 1790 ont pu rendre rachetables les rentes foncières, les champarts, les locatairies perpétuelles en argent ou en nature, parce qu'ils ont pu établir, à défaut d'accord, des bases certaines de racbat; la périodicité étant dans l'essence de ces revenus, les bases suivies par la loi pour régler le taux du remboursement étaient certaines. Ici rien de pareil la transaction de 1803, qu'il n'est plus permis de discuter quant à sa validité, en créant la redevance du 18e panier, a créé non pas une rente en nature, non pas une participation aux revenus annuels d'un fonds, mais une copropriété dans les produits de la mine. Or, ces produits ne sont pas annuels; ils arrivent au jour le jour; ils sont réguliers ou incertains; ils sont rares ou abondants; en un mot, celui qui a droit à la redevance court, avec l'exploitant même, toutes les chances du produit brut, et cela tant que dure l'exploitation.

« Dans cette redevance, manque la périodicité ou si nous pouvons nous servir de cette expression, l'annalité de la redevance, du revenu, du produit. L'annalité est de l'essence des redevances foncières déclarées

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rachetables par les lois de la constituante, et cette essence est précisément l'opposé de ce qui existe dans la redevance due aux défendeurs, laquelle manque fondamentalement de périodicité.

« Car, notons-le en passant, cette périodicité ne résulte pas de ce que le compte du produit brut de la mine doit se faire à des époques déterminées (tous les six mois, par exemple) la fixation de ces époques détermine un mode de liquidation sans plus, mais nullement une échéance d'obligation. C'est jour par jour, de moment en moment que le propriétaire du 18e panier jouit de la copropriété d'une dix-huitième part dans le produit brut de la mine: seulement, termes de comptabilité, on a stipulé que la liquidation du 18 panier serait faite deux fois par an, tous les six mois.

en

Il n'y a donc rien de commun entre le mode de liquidation du produit de la mine et l'annalité de la redevance foncière (rente, champart, locatairie, etc). terrage, Que cette annalité soit de l'essence de ces redevances rachetables, cela est d'une palpable évidence. Qu'est-ce qu'une rente en général? C'est un revenu annuel en argent ou en denrées. -Qu'est ce qu'une rente foncière ? C'est le droit de percevoir tous les ans, sur un fonds, une redevance fixe en fruits ou en argent. En d'autres termes, c'est une somme, valeur ou quantité de choses mobilières ou fongibles qui doit être annuellement payée (1).

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Le mot général de reditus, qui est proprement le retour annuel, n'a pas une autre définition: Quidquid ex re aliqua obvenit et redit; sic reditus prædii est proventus qui quotannis redit.

• Le capital restant sauf, c'est sur la nature annuelle du produit, du revenu, de la rente qu'est établi d'une part tout le système du remboursement organisé par la lo de 1790, d'autre part, tout le mécanisme de la perception des droits d'enregistrement par les lois de 1791 et de l'an vii.

« C'est la nature annuelle de l'intérêt qui sert de base à la loi du 3 septembre 1807; ni dans le texte de cette loi, ni dans les discours qui l'ont motivée, vous ne lirez le mot année, annuelle, tant il est de l'essence de l'intérêt d'être annuel : seulement, Jaubert, en indiquant le taux de 5 p. c. comme intérêt légal observait que ce taux se rap

(1) Voy. Merlin, Rép, vis Rente, Rente foncière; Championnière et Rigaud, no 1292.

proche du revenu des terres : que cela soit vrai ou non aujourd'hui, nous pouvons du moins dire que intérêts et revenus sont partout considérés annuellement.

En droit romain, sur quoi est fondée la fameuse constitution de Justinien (loi 26, $1, C. de Usuris) sur le taux de l'intérêt ? Sur le produit annuel; les centesimæ représentaient 12 p. c. par an ou un p. c. par mois, et les subdivisions de l'intérêt prenaient ce taux pour base. C'est encore sur celte base que repose la maxime qui forme le 4o parème de Matthæus: Reditus pro uno anno est reditus pro centum annis - Luitio annalis est luitio centenaria.

Si ce principe de l'annalité est évident et essentiel pour les revenus, les reditus dont le rachat est réglé par la loi de 1790, confirmé par les lois postérieures et garanti par notre code civil (1), ne devons-nous pas dire que le droit comme le mode de rachat ne doit pas, ne peut pas être étendu à une matière toute différente. Certes nous ne disons pas que le 18 panier ne puisse être évalué d'après des procédés particuliers que nous n'avons pas à apprécier ici; mais nõus soutenons qu'il n'a pas pu entrer dans l'intention du législateur de 1790 et du code civil d'étendre à une redevauce éventuelle dans le produit d'une mine, les principes du rachat facultatif ou obligatoire créés pour les revenus annuels et réguliers que les lois de 1789 et 1790 avaient en vue. Et si cela est certain, comment l'arrêt attaqué aurait-il violé les dispositions invoquées à l'appui du pourvoi et qui sont étrangères à la matière réglée par la transaction de 1803?

• Ces considérations essentielles suffiraient déjà pour justifier nos conclusions, sans même entrer plus avant dans le détail des objections que le mémoire de défense a d'ailleurs réfutées. En définitive, l'arrêt attaqué décide que le droit au 18° panier dans le produit brut de la mine constitue une prestation sui generis à laquelle, sous aucun rapport, ni légalement par la matière, ni pratiquement par le fait, les décrets de 1789 et 1790 ne sont applicables, et en déci dant ce point, il a justement rejeté les prétentions de la société demanderesse.

Au surplus, nous ferons ici une observation fondamentale : le procédé suivi par la société pour fixer le taux du rembourse

(1) Voy. Art. 530, rente foncière essentiellement rachetable. Art. 1911, rente constituée essentiellement rachetable.

ment, est purement arbitraire; ce n'est certes pas la loi de 1790 qui le lui a inspiré : elle prend la moyenne des prestations fournies pendant 50 ans, depuis la date de la transaction et elle capitalise cette moyenne au denier 20. Mais quelle base légale possède donc un tel calcul? Quelle est la loi qui l'a établi, quelle est la loi qui force la partie intéressée à l'accepter? Quelle est la loi qui autorise le juge à le consacrer? Cette loi n'existe pas et s'il n'existe pas de loi qui l'impose à la partie et au juge, il faudrait du moins un accord, une convention qui réglât le remboursement, et cette convention est loin l'exister.

«Nous ajoutons que si la loi de 1790 n'a pas réglé le mode de remboursement d'une part dans le produit des mines, c'est parce qu'elle n'a pas voulu s'en occuper, car elle a toujours eu soin de mettre le mode de rachat en rapport catégorique avec la faculté de l'exercer.

«La société demanderesse s'est attachée bien inutilement à vous faire l'histoire du décret du 4 août et l'analyse des rapports de Merlin à la constituante, en vue d'établir, comme principe fondamental, que le décret de 1789 doit être interprété et appliqué largement. Ces rapports, connus d'ailleurs, ont leur formule dans ce décret même et leur application dans celui de décembre 1790.- Impossible de les séparer. Or, la constituante a aboli, d'une part, tout ce qui était féodal; elle a, d'autre part, autorisé le rachat de tout ce qui grevait foncièrement el à titre perpétuel les immeubles. Elle a voulu favoriser la liberté de la terre, la circulation du sol, la division des propriétés, les progrès de l'agriculture, la multiplication des propriétaires. Elle a saisi toutes les charges périodiques qu'elle a définies et qualifiées, elle a comme conséquence inséparable et pratique, à défaut d'accord, établi le tarif des rachats : ce tarif est sacramentel, spécial, rigoureux, obligatoire; il est fait pour les rentes, baux, redevances empreints d'annalité; c'est le produit annuel des rentes et redevances foncières en argent ou eu nature que la loi a eu en vue; et en effet, celles-là seules grevaient le sol de la France, le vaste champ de l'agriculture.

« La constituante a dit textuellement le 4 août : Défenses sont faites de plus à l'avenir créer aucune rente non remboursable.

Elle a dit textuellement le 18 décembre 1790 (art. 1er): Il est défendu de plus à l'avenir créer aucune redevance foncière non remboursable, sans préjudice des baux à

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