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la Cour de Caen, une formule qui nous paraît trèsbonne:

« Considérant.... que les cours et passages communs étant par leur nature soumis à un état d'indivis perpétuel, sont aussi bien la copropriété des communistes dans chacune de leurs parcelles que dans le tout; d'où résulte une rencontre et une confusion de droits concurrents sur l'ensemble et les parties de la chose, qui se résout dans la nécessité que cette chose soit réputée la propriété de chacun, toutes les fois que cela peut se faire sans préjudice à la propriété de tous;

« Considérant que ce système est parfaitement en harmonie avec l'intérêt général, en ce qu'il tend à diminuer, autant que possible, l'inconvénient des communautés, qui paralysent toujours plus ou moins l'utilité des choses....» (24 août 1843, Harel, Rec. de Caen, t. VI, p. 453.)

Notre règle sera donc que chacun des communistes pourra exercer soit sur sa propriété particulière, soit sur la chose commune, qui est à son usage, tous les droits qui dérivent de la propriété, sous cette restriction toutefois, qu'il n'en résultera ni dommages pour la chose commune, eu égard à sa nature et à sa destination, comparée à la destination et à la nature des héritages au service desquels elle est affectée, ni empêchement pour les autres propriétaires d'exercer également les mêmes droits ou des droits différents sur leurs propriétés particulières et sur la chose commune (comp. Vaudoré, t. II, vo Plantations, § 1, n° 16).

446. La règle étant ainsi posée, toutes les autres questions deviennent des questions dé fait à résoudre par les magistrats, d'après les circonstances particulièrės de chaque espèce, eu égard à la destination de la chose indivise, et au rôle qu'elle joue vis-à-vis des autres propriétés principales, dont elle est l'accessoire.

Que le copropriétaire d'une cour commune puisse

exhausser sá maison donnant sur cette cour, et y pratiquer des ouvertures, des fenêtres ou une porte, cela ne saurait guèré être contesté (comp. Cass., 5 déc. 1827, Tasse, D., 4828, I, 49; Caen, 24 août 1843, Harel, Dev., 1843, II, 79; Cass., 40 nov. 1845, Viollat, Dev., 1846, I, 487; voy. toutefois Caen, 26 déc. 1843, Mériel, Rec. de Caen, t. VII, 647).

On considère généralement aussi qu'il peut pratiquer dans son mur des gouttières, des entonnoirs, donnant sur la cour commune (Cass., 6 fév., 1822, Cordier, Dev., et Car., Collec. nouv., 7, I, 27; Cass., 5 déc. 1827, Tasse, Dev., 1828, I, 49; Fournel, du Voisinage, vo Cour commune, t. I, p. 352).

Il en serait toutefois autrement d'une simple allée commune, qui ne paraîtrait pas destinée à servir d'égout (Bannelier sur Davot, t. I, p. 179), et même aussi d'une cour commune, si l'un des communistes prétendait y établir un réceptacle d'eaux ménagères, qui produirait des inconvénients pour les autres communistes (Caen, 2 chambre, 12 juin 1830, Mollet; Caen, 23 avril 1847, Lemoine, Dev., 1848, II, 380; comp. toutefois Caen, 26 février 1862, Leclerc, Rec. de Caen, 1862, p. 79).

On a même jugé qu'il pouvait arriver, d'après l'état des faits, que le copropriétaire d'une cour commune, qui établit une auberge dans une maison communiquant avec cette cour, fût fondé à se servir de cette cour pour passage des voitures publiques ou particulières qui se rendent à son auberge (Cass., 15 avril 1850, Percheron, Dev., 1850, I, 151).

le

Chacun des copropriétaires peut aussi y étendre du linge, y déposer momentanément son bois, y attacher des chevaux, etc.; tout cela, sauf règlement en cas de difficultés, et de manière à concilier les droits respectifs de chacun (comp. Caen, 1re chambre, 28 mars 1833, Lecordier; 17 juin 1833, Lefèvre; Caen, 4 nov. 1840, Flon,

Rec. de Caen, 1840, p. 510; voy. toutefois Caen, 29 déc. 1854, Frémont, Rec. de Caen, t. V, p. 78).

447. Si étendu que soit le droit de chacun des communistes, notons bien pourtant qu'aucun d'eux ne pourrait, sans le consentement des autres, se permettre, sur la chose commune, des innovations, comme des constructions, par exemple, qui la dénatureraient (arg. de l'article 1859-4°; comp. Grenoble, 12 janv. 1818, Gras; Bourges, 16 janv. 1826, Jacob, Dev. et Car., Collect. nouv., 5, II, 343 et 8, II, 180; Metz, 6 février 1857, Ginoux, Dev., 1858, II, 44; Pardessus, t. I, no 192).

Encore moins pourrait-il disposer de la chose au delà de ses droits personnels, et l'affecter, même par un sim ple bail, au service d'un tiers (comp. Cass., 8 janv. 1844, de Castellane, Dev., 1844, I, 723; Duranton, t. XVII, no 35; Duvergier, du Louage, t. I, no 87).

Et la Cour de Caen a également décidé que le proprié taire d'une maison, ayant un droit de copropriété dans une cour commune, ne pouvait y exercer la profession de ferblantier, lorsque le bruit qui en résultait était préjudiciable aux propriétaires des autres maisons ayant également droit à la cour (2° chamb., 4 déc. 1840, Flon). C'est là du moins une question de fait qui dépend de la plus ou moins grande incommodité de l'industrie qui y serait exercée (infra, no 558). Mais il importe toutefois de remarquer qu'en règle générale, les obligations qui naissent du voisinage, sont, dans l'hypothèse qui nous occupe, plus rigoureuses que celles qui existent entre voisins dont les propriétés n'ont pas une origine commune. Et c'est ainsi que le Parlement de Paris a jugé que le propriétaire du rez-de-chaussée ne pouvait pas établir une forge dans ses appartements, si les propriétaires des étages supérieurs s'y opposaient (arrêt du 26 janvier 1672, Desgodets, p. 79, supra, n° 438); et pourtant nous verrons que l'établissement d'une forge est en général permis, sans que le voisin puisse s'en plaindre (in

fra, no 658; comp. Chambéry, 14 mai 1870, Tournier, Dev., 1870-II-247).

448. Quant aux charges, et à la manière dont elles seront supportées par chacun des communistes, il faut, avant tout, consulter les titres qui font la loi des parties.

A défaut de clauses spéciales sur ce point, la règle est que les charges doivent être, en général, supportées dans la proportion de l'intérêt de chacun (arg. de l'article 664); et il appartient aux magistrats, dans le règlement qu'ils en font, lorsque les parties ne s'accordent pas à l'amiable, de déterminer équitablement, en raison de toutes les circonstances de fait, et par interprétation de l'intention vraisemblable des communistes eux-mêmes, de quelle manière la répartition de ces charges doit être faite entre les contribuables (arg. de l'article 1135; comp. art. 249 de la coutume d'Orléans; Pothier, de la Société, no 227, 228; Auroux, sur l'article 512 de la cout. de Bourbonnais; Desgodets, sur l'article 187 de la cout. de Paris; Cass., 2 fév. 1825, de Foresta, D., 1825, I, 114).

449. Il est aussi bien entendu que chacun des communistes peut s'affranchir de l'obligation de contribuer aux charges, par l'abandon de son droit dans la chose commune; c'est le principe général qui gouverne toute notre matière (art. 656; supra, n° 435; Pothier, loc. cit., n° 220; Pardessus, t. I, no 192).

$3.

Des fossés mitoyens (ou non mitoyens).

SOMMAIRE.

450. Le Code se borne ici à établir une présomption de mitoyenneté; et il n'applique pas aux fossés les règles sur l'acquisition forcée de la mitoyenneté ni sur l'obligation de se clore.

451.

Dans quels cas la mitoyenneté d'un fossé est-elle présumée? - La présomption de mitoyenneté peut être détruite, soit par un titre, soit par une marque du contraire.

452.

Du titre.

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453, -Suite. fossé.

454.

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Des bornes qui seraient placées de l'un des côtés du

De la marque de non-mitoyenneté résultant du rejet de la terre d'un seul côté.

455. - Suite.

456.

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Suite.

-

La simple possession annale du fossé à titre exclusif, par l'un des voisins, serait-elle destructive de la présomption de mi

toyenneté?

457.Suite. De l'acquisition du fossé par prescription,

faits pourrait-elle résulter?

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De quels

Peut-on admettre d'autres marques de non-mitoyenneté du fossé

que le rejet de la terre d'un seul côté?

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459. — Quid, si la marque de non-mitoyenneté était contredite par un titre écrit ou par l'existence de bornes reconnues?

460. Des obligations et des droits qui résultent de la mitoyenneté du fossé. Quid, s'il se trouve des arbres dans les fossés?

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L'un des copropriétaires peut-il abandonner son droit de mitoyenneté dans le fossé, pour se dispenser de contribuer aux frais d'entretien?

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Quels sont alors les effets de l'abandon?

463. Au lieu d'abandonner la mitoyenneté, chacun des propriétaires ne pourrait-il pas demander le partage du fossé?

464. Chacun peut ouvrir un fossé sur son propre fonds exclusivement.

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Mais doit-on, dans ce cas, laisser un certain espace entre le bord du fossé et le fonds du voisin?

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466. Le terrain de la répare est-il prescriptible?

467. Celui auquel un fossé appartient exclusivement peut-il le combler?

450.- Nous avons vu que, relativement aux murs, notre Code a établi trois règles principales:

4° La présomption de mitoyenneté (art. 653);

2° La faculté pour tout propriétaire joignant un mur d'en acquérir la mitoyenneté (art. 661);

3o Le droit, pour chacun des voisins, dans les villes et faubourgs, de contraindre son voisin à la construction d'un mur mitoyen (art. 663; supra, no 313).

La première de ces règles est la seule qui soit ici reproduite relativement aux fossés (art. 666); nous n'y retrouvons pas les deux autres, qui, en effet, n'étaient pas commandées, dans ce cas, par les mêmes motifs; ețil faut tenir pour certain:

1° Que le propriétaire joignant un fossé, ne peut pas

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