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à cette faculté, s'il arrive que son voisin, au lieu d'y contribuer avec lui, comme il l'y provoque, veuille au contraire lui laisser tout le fardeau des dépenses. Celui-là même qui proposait d'abord la réparation ou la reconstruction du mur, pourra donc aussi de son côté l'abandonner; et alors on partagera les matériaux et le sol; et si aucun des deux ne prend cette initiative, le mur restera là en ruine, et les propriétaires voisins sans clôture (comp. Pardessus, t. I, no 168).

391. Lorsque le voisin accepte l'abandon de la mitoyenneté fait par son copropriétaire, il devient propriétaire exclusif du mur ; et il fera bien, en conséquence, d'exiger un acte de cet abandon, ou de détruire, de toute autre manière, la présomption légale de mitoyenneté qui pouvait exister auparavant.

Mais de ce qu'il est devenu propriétaire exclusif du mur, en faut-il conclure qu'il peut dès lors le détruire ou le laisser tomber, pour profiter seul des matériaux et du sol sur lequel le mur reposait? Il n'en saurait être ainsi; l'abandon du voisin n'est fait que dans le but de se décharger de l'obligation de réparer et de reconstruire; et par conséquent, il implique naturellement que l'obligation de reconstruire et de réparer subsistera; donc, l'abandon serait sans cause, si le voisin, au lieu de conserver le mur et de prendre sur lui toute la charge des dépenses, l'abandonnait en réalité lui-même en ne le réparant pas. Le voisin qui a fait l'abandon, serait donc fondé, dans ce cas, à répéter sa part des matériaux et du terrain (comp. Pothier, de la Société, no 221; Toullier, t. II, no 220; Duranton, t. V, no 320; Pardessus, t. I, n° 468; Zachariæ, t. II, p. 46; Demante, t. Il, no 510 bis, II).

392. Cette faculté d'abandon existe-t-elle nonseulement dans les campagnes, mais encore dans les villes et faubourgs?

C'est là une question que nous avons examinée plus

haut, avec les développements que mérite son importance (supra, no 379).

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393. Remarquons bien, d'ailleurs, que les règles que nous venons de poser sur l'obligation, pour chacun des copropriétaires du mur mitoyen, de contribuer, proportionnellement à son droit, aux frais de réparation et de reconstruction, et sur la faculté d'abandon de la mitoyenneté, que toutes ces règles ne s'appliquent qu'au cas où la nécessité de la réparation ou reconstruction provient de la vétusté ou d'un accident quelconque de force majeure non imputable à l'un des voisins. (Comp. Paris, 24 mars 1879, Comp. d'assurances la Nationale, Dev., 1879-2-137.)

Il en est au contraire, tout autrement, lorsque l'un des propriétaires a nécessité par sa faute, ou par celle des personnes dont il doit répondre, la réparation ou reconstruction du mur; comme, par exemple, en le froissant ou en l'ébranlant avec ses voitures ou charrettes, etc.

C'est, en effet, un principe général que chacun doit réparer le dommage qu'il a causé injustement à autrui (art. 1382, 1383); et c'est un principe particulier de la communauté, que chacun des copropriétaires doit prendre soin de la chose commune comme si elle lui appartenait exclusivement, et qu'il est tenu de réparer seul les dégradations qui proviennent de sa faute ou de sa négligence. Et de là deux conséquences:

1° En pareil cas, tous les frais de réparation et de reconstruction sont à la charge de celui qui y a donné lieu; et il doit même indemniser alors son copropriétaire des incommodités, des privations de jouissances, et des pertes, que la réparation ou la reconstruction peut lui causer, si qui reditus ob demolitionem amissus est (L. 37, ff. de damno infect.); pertes toutefois qui, dans ce cas même, doivent être appréciées eu égard aux travaux, que l'autre voisin a pu lui-même, sans imprudence, faire sur ou contre le mur mitoyen relativement à sa destina

tion; et c'est ainsi que ce voisin ne pourrait pas réclamer le rétablissement ou l'indemnité des peintures pretiosissimæ, qu'il aurait fait faire à ce mur, mais seulement le prix des peintures vulgares (L. 13, ff. de servit. urb. præd.; Domat, Lois civ., liv. I, tit. xii, sec. IV, no 4; supra, no 387, et infra, no 405).

2o Celui qui, par sa faute, a nécessité la réparation ou la reconstruction, ne pourrait pas s'affranchir, par l'abandon de la mitoyenneté, de cette obligation personnelle qui est née pour lui, non pas de la mitoyenneté, mais d'une sorte de quasi-délit, quasi ex delicto.

En un mot, ni l'article 655, ni l'article 656 ne seraient alors applicables (comp. Cass., 16 déc. 1863, Guérin, Dev., 1864, I, 33; Pothier, de la Société, n° 219 et 221, Zachariæ, t. II, p. 46; Pardessus nos 166 et 168; Demante, t. II, no 510 bis, I).

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394. Dans quels cas y a-t-il lieu à la réparation ou à la reconstruction du mur mitoyen?

Ce n'est là, bien entendu, qu'une question de fait, à décider surtout d'après le rapport des gens de l'art. Remarquons toutefois qu'il n'est pas nécessaire que le mur soit en ruine; il suffit que la reconstruction en soit reconnue nécessaire. Cette nécessité de réparation et de reconstruction, d'ailleurs, peut être totale ou seulement partielle.

Au reste, il est bien clair qu'il n'appartient ni à l'un ni à l'autre des copropriétaires séparément, de décider seul cette question (L. 8, ff. de servit. præd. urban.). Ce n'est que dans les cas d'urgence et de péril imminent, que l'un d'eux pourrait, même sans consulter l'autre, y pourvoir; et encore, serait-il prudent de sa part de faire constater, s'il le pouvait, cette urgence, par le juge ou par la police locale.

Mais en règle générale, lorsque la nécessité de la réparation ou reconstruction n'est pas reconnue de part et d'autre, celui des copropriétaires qui prétend qui 'elle

existe, doit la faire constater contradictoirement avec l'autre et obtenir un jugement contre lui. Nous avons même vu que s'il en avance les frais, il peut exercer son action en remboursement contre les tiers acquéreurs (comp. Cass., 24 mars 1843, Pochet, Dev., 1843, I, 350; supra, n° 10; Pothier, de la Société, no 220; Pardessus, t. I, no 166).

395. Chacun des voisins d'ailleurs ne peut être contraint de reconstruire le nouveau mur que dans les conditions du mur ancien, sous le rapport de la profondeur des fondations, de l'épaisseur, de la hauteur et de la qualité des matériaux; car c'est le mur mitoyen qu'ils sont réciproquement tenus de rétablir (art. 655), c'està-dire le mur qui existait, celui-là et non pas un autre (comp. art. 210 de la cout. de Paris; Pothier, no 222). Telle est la règle, à laquelle toutefois il faut apporter deux exceptions, savoir:

1° Si le mur avait été originairement, par une mauvaise économie, dit Pothier (n° 222), formé de matériaux de mauvaise qualité et n'était pas dès lors assez solide;

2o Si, même indépendamment de cette circonstance, le mur, d'après sa construction ancienne, sous le rapport de l'épaisseur ou autrement, ne suffisait plus à l'usage auquel l'un et l'autre des copropriétaires l'employaient au moment même de la reconstruction.

Ces deux exceptions sont aussi justes que la règle; elles dérivent du droit incontestable qui appartient à chacun des communistes, d'exiger toutes les mesures nécessaires pour que la chose commune soit conservée et puisse remplir sa destination.

Il est bien entendu, du reste, que celui des deux propriétaires qui voudrait, dans son intérêt, que le mur nouveau fût meilleur que l'ancien, plus haut ou plus épais, pourrait toujours le rendre tel en payant seul l'excédant des dépenses (voy. art. 658, 659; Pothier,

TRAITÉ DES SERVITUDES.

I-29

n° 214 et 222; Paris, 26 déc. 1866, Malenfant, le Droit

du 16 janv. 1867).

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Des droits qui dérivent de la mitoyenneté
d'un mur.

SOMMAIRE.

396. Règle générale. - Trois applications principales de cette règle: 397. 1° Du droit de bâtir sur le mur mitoyen et d'y appuyer des poutres et solives?

398. 2o Du droit d'exhausser le mur mitoyen.

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400. - Du cas où le mur peut supporter l'exhaussement sans qu'il soit nécessaire de le reconstruire.

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401. Suite. L'indemnité de la charge résultant de l'exhaussement devra être payée de nouveau chaque fois qu'il y aura lieu de reconstruire le mur dans les mêmes conditions.

402. Suite.

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Quid, si le propriétaire qui a exhaussé le mur, sans le reconstruire, l'avait fortifié à cet effet? devrait-il une indemnité à raison de la charge?

403. Suite.

Les travaux quelconques que l'on élève sur le mur mitoyen, ne doivent pas être placés sur l'un des côtés seulement du

mur.

404. Du cas où il est nécessaire de reconstruire le mur mitoyen afin de l'exhausser.

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405. Suite. Le copropriétaire qui reconstruit, dans son seul intérêt, le mur qui était encore solide, doit-il indemniser le voisin de tous les dommages qui pourront en résulter?

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- Lorsque le mur a été reconstruit par l'un des voisins avec des matériaux plus forts ou un excédant d'épaisseur, les charges et les droits de la mitoyenneté demeurent-ils, de part et d'autre, les mêmes qu'auparavant?

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L'exhaussement est la propriété exclusive de celui qui l'a con-
Conséquences.

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Chacun des copropriétaires a aussi le droit de donner au mur mitoyen plus de profondeur souterraine. A quelles conditions?

410.

3o Quant aux autres usages auxquels peut servir le mur mitoyen et que la loi n'a pas prévus, la règle est que chacun des copropriétaires peut en retirer tous les services qu'il est susceptible de rendre d'après sa destination, sous la condition de ne nuire ni au mur ni au voisin. Exemples.

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411. Quid, s'il s'agit d'ouvrages qui entament le mur et qui y opèrent des enfoncements, d'une niche, par exemple, ou d'une armoire? 412. Suite. Quid, relativement aux tuyaux de descente des fosses

d'aisances?

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