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suite ne s'oppose point à ce qu'il en soit exercé une seconde, à raison du même fait, contre un autre accusé; car, dit M. Merlin, le jugement qui intervient sur le premier des deux procès n'a et ne peut avoir aucune influence sur le jugement du second, parce que celui-ci n'a pas du nécessairement être précédé par celui-là, ou, en d'autres termes, parce que celui-là n'est point préjudiciel à celui-ci ; et c'est ce qui explique pourquoi le jugement qui, sur l'accusation portée contre Pierre d'avoir empoisonné Jean, déclare qu'il n'y a point eu d'empoisonnement, ne fait nul obstacle à ce que Paul soit ensuite recherché, accusé et condamné comme coupable du même crime; c'est ce qui explique pourquoi, quand même Pierre aurait été condamné comme coupable d'avoir empoisonné Jean, Paul pourrait ensuite être condamné comme coupable et seul coupable de cet empoisonnement L'arti 443 du C. d'instr. crim., en ouvrant la voie de la révision pour le cas où deuxaccusés sont successivement condamnés pour un même crime, suppose, en effet, que deux accusa-tions, même contradictoires l'une avec l'autre, peuvent se suivre, et que la condamnation du premier accusé ne met point obstacle à la poursuite de l'au tre 25 esb 201.DA

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Mais lorsque le moyen de défense est le même dans les deux accusations sucéessives, et que ce moyen a été accueilli par le premier jugement, est-ce que les co-accusés ou les complices ne seront pas admis à se Callim 19 0 2 who do ve ter 11 pt

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Quest. de droit, v Faux, §6. -Conf. Mangin, t. II, p. 337.

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prévaloir de la chose jugée, par cela seul qu'ils n'ont pas figuré dans la première procédure? pourra-t-on leur opposer que les jugements n'ont l'autorité de la chose jugée qu'à l'égard de ceux qui y ont été parties? i.

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S'il a été décidé par le premier jugement ou que le crime n'existait pas, ou que le fait, objet de la poursuite, n'était pas punissable, il est certain que ee jugement fait obstacle à toute poursuite ultérieure. Telle était la décision de Julius Clarus: Si reus fuerit absolutus, eò quia crimen commissum non fuerit, non po test ampliùs criminaliter accusari 4. Et la raison en est évidente: dès qu'il a été judiciairemont reconnu que le crime n'a pas été commis ou que le fait incriminé ne constitue ni crime, ni délit, ni contravention, il n'est plus permis de remettre l'un ou l'autre point en question; aux yeux de la justice; il n'y a plus de fait punissable; comment pourrait-il y avoir une séconde poursuite? La question relative à l'instance ou à la criminalité du fait poursuivi est préjudicielle à cette poursuite; or, cette question a été jugée; l'aetion se trouve donc éteinte. Comment d'ailleurs une seconde poursuite serait-elle possible lorsque le prémier jugement a déclaré que le fait n'a jamais existé ou qu'il l'a dépouillé de toute criminalité? que de viendrait l'autorité de ce jugement? S'il a force de chose jugée, comment expliquer une action qui l'attaquerait directement? Dira-t-on qu'il n'a force de chose jugée qu'à l'égard de l'accusé qui y a été partie, et non de ses complices? Mais le ministère puQuæst. 57, num. 2.

blic n'y a-t-il pas été partie? N'est-ce pas contre lui qu'il a été rendu? Et puis, qu'importe qu'un seul accusé fût en cause si le jugement n'a pas été fondé sur des motifs personnels à cet accusé, s'il a été fondé sur un motif commun à tous? Il ne s'agit point ici d'un intérêt privé, dont la décision ne peut s'étendre d'une partie à une autre, paree que chacune dispose librement de son droit; il s'agit d'un intérêt public qui est le même vis-à-vis de toutes les parties et qui leur impose nécessairement la même position. H est vrai que le ministère public a pu découvrir, depuis les premières poursuites, que les vérifications avaient été mal faites, que l'appréciation du fait avait été erronée; mais telle est la puissance de la chose jugée qu'elle doit prévaloir sur la vérité elle-même; l'intérêt qui a établi cette fiction la protége contre toute preuve contraire; il y aurait plus de péril à constater l'erreur du premier jugement qu'à en étendre le bénéfice aux complices.

La Cour de cassation a plusieurs fois consacré cette doctrine. Dans une première espèce, il avait été jugé, par un conseil de guerre, qu'un militaire, prévenu de désertion, n'était pas coupable de ce crime, et toutefois, postérieurement à ce jugement, un autre individu avait été condamné pour avoir recelé ce militaire en qualité de déserteur. La Cour de cassation a cassé ce second arrêt : « Attendu que la Cour n'avait pu, sans commettre un excès de pouvoir, déclarer l'accusé coupable d'avoir recelé sciemment Carteaux, déserteur, ni lui appliquer, comme complice d'un crime de désertion qui n'a pas existé, la

peine portée par la loi 1. » Le premier jugement, renda contre l'un des accusés, a donc exercé une influence décisive sur le second, rendu contre un autre accusé. Dans une autre espèce, la Cour de cassation a déclaré en principe: que si de deux accusés traduits en jugement, l'un comme auteur d'un crime et l'autre comme complice, le premier est déclaré non coupable et le second coupable de complicité, ces déclarations peuvent être concordantes lorsqu'il existe un corps de délit auquel la complicité puisse se rattacher avec l'auteur quelconque de ce délit, qui n'est pas connu ou mis en jugement; mais qu'il n'en peut être ainsi lorsqu'il résulte de la déclaration du jury qu'il n'y a ni corps de délit, ni auteur de ce prétendu délit; que, dans ce dernier cas, la complicité ne se rattache à aucun fait, ni à aucun auteur de ce fait, et qu'elle est purement chimérique 2. Et le même arrêt, appliquant ce principe au crime de banqueroute frauduleuse, a décidé : « qu'il est d'une contradiction manifeste de déclarer que le négociant failli, accusé de ce crime, n'a point détourné, au préjudice de ses créanciers, des marchandises et effets mobiliers faisant partie de son actif, qu'il n'y a par conséquent sous ce rapport ni banqueroute frauduleuse ni auteur de cette banqueroute, et que cependant il y a un coupable de complicité, pour s'être entendu avec ce dernier, et soustraire une partie de ses marchandises. » Ainsi, en matière de

Arr. Cass. 7 mars 1806 (J. du pal., t. V, p. 215).

* Arr. Cass. 22 janv. 1830 et 17 mars 1831 (Dev., 31, 1, 257 et 333); voy. en sens centr, cass. 13 prair. an x11 (Dev., 1, 000).

banqueroute, il n'est pas même nécessaire que le premier arrêt ait déclaré que le fait n'existait pas ou n'était pas punissable, la non-culpabilité de l'auteur principal suffit pour faire obstacle à toute poursuite ultérieure contre les complices, parce que le crime, ne pouvant exister en dehors de cet accusé, n'existe plus dès qu'il est jugé que cet accusé ne l'a pas commis. Il en serait de même dans les accusations de bigamie ou de faux commis par un officier public. A l'é. gard des autres crimes, comme on l'a dit, la non-culpabilité de l'auteur principal ne suffirait pas pour arrêter la seconde poursuite, car ces crimes pourraient avoir été commis par une autre personne que cet accusé...

L'identité des parties n'est donc pas, en matière criminelle, un élément nécessaire de l'exception de la chose jugée, puisque le premier jugement peut être opposé au plaignant, qui est demeuré étranger à la poursuite dirigée par le ministère public, puisque le même jugement peut être invoqué par un accusé qui ne figurait pas dans les débats.

Ce point établi, nous arrivons à la troisième condition de l'exception, à savoir, l'identité des fuits incriminés.

L'art. 360 pose en principe que l'accusé, après avoir été acquitté, ne peut plus être repris ni accusé à raison du même fait. Que faut-il entendre par ces dernières expressions? Dans quels cas les deux procédures doivent-elles être réputées avoir pour objet le même fait? Quelles sont les conditions de cette identité?

Il semble, à la première vue, que cette question ne

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