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jugements correctionnels dont il n'y a pas eu d'ap pel, ni sur celui des arrêts rendus sur l'appel des' jugements correctionnels, ni sur celui des arrêts qui ont été rendus en conséquence de déclarations de jurés, ni sur celui des arrêts qui, dans les procès où il n'intervient pas de jurés, prononcent à la fois sur le fait et sur le droit 1. Nous verrons plus loin que ces jugements et ces arrêts ont l'autorité de la chose jugée, et que, par conséquent, ils donnent lieu, en faveur des prévenus ou des accusés qui en sont l'objet, à l'application de la règle non bis in idem. La loi s'est bornée à consacrer la règle,' sans en prévoir toutes les applications.

La loi a donc posé la règle en termes généraux, mais avec netteté, et lui a assigné ses conséquences principales. La première de ces conséquences est que tout jugement, intervenu dans une poursuite. criminelle pour y mettre un terme, et qui est devenu définitif, met obstacle à toute poursuite alté: ricure. Les restrictions créées par les juristes dans le droit romain et dans notre ancien droit, et qui avaient pour objet d'ôter au principe une partie de sa force, n'ont plus d'application. C'est ainsi qu'il n'y a plus lieu de distinguer si la partie à la requête de laquelle la deuxième poursuite est exercée a ignoré la première action et a un intérêt personnel à poursuivre la voie criminelle ne peut être prise deux fois à raison du même délit; la première poursuite a purgé l'accusation. C'est encore ainsi Merlin, Rép., vis Non bis in idem, nɔ k.

qu'une condamnation à une peine moindre la que peine légale, a les mêmes effets qu'un acquittement. La Cour de cassation a jugé, par application de cette règle, que les juges qui ont omis de prononcer l'aggravation, de la peine résultant de la récidive, ne peuvent, après jugement, se ressaisir de l'affaire pour réparer cette omission 4. En effet, d'une part, le pouvoir des juges, est épuisé, et d'un autre côté, le jugement, quels que soient ses termes, est acquis au condamné.!

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Une autre conséquence est que cette exception peut être proposée en tout état de cause et prononcée même d'office par le juge. En effet, puisqu'elle a pour effet de mettre obstacle à la deuxième poursuite et par conséquent d'éteindre l'action, il est évident que, à quelque degré que soit parvenue la procédure au moment où ello se révèle, cette procédure est arrêtée dans son cours et n'a plus d'ob jet. L'accusé est donc toujours recevable à la faire valoir, et, s'il garde le silence, le ministère public, et même le juge, d'office, doit la suppléer. C'est ainsi que, dans le droit romain, les voies de recours pouvaient être exercées par les parents de la partic intéressée lorsqu'elle négligeait de les exercer, ut causâ cognitâ, et invito ei succurratur 2. Et c'est encore ainsi que, dans notre ancien droit, les cours connaissaient des condamnations à des peines corpó

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Arr. Cass. 18 floréal an vi et 18 fruetidor an vii (Dev., t. I, 1, 197, et t. II, 1, 161).

L. 3 Dig., De liberali causâ.

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LIV. II. DE L'ACTION PUBLIQUE ET DE L'ACTION CIVILE.

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relles, soit qu'il y eût appel ou non. En matière criminelle, dit Merlin, la maxime nemo auditur net rire volens s'oppose à ce qu'un accusé absous, par un premier jugement, renonce à son absolution, et s'il le fait, le ministère public doit réclamer pour lui 2 La Cour de cassation a consacré cette solution. Jean Riva, accusé de tentative de meurtre, avait été jugé et acquitté le 28 février 1896 par le conseil suprême de Parme. Le procureur général de Plaisance, ignorant ce jugement, avait ultérieurement exercé une nouvelle poursuite contre le même accusé qui n'avait point excipé de la première poursuite. Condamné à deux ans d'emprisonnement et le ministère public ayant formé un pourvoi, les pièces furent transmises à la Cour de cassation, qui annula l'arrêt « Attendu qu'il résulte de l'examen des pièces qu'il existe un arrêt rendu par le ci-devant conseil suprême de Parme qui a ordonné la mise en liberté du prévenu, arrêt qui n'a été attaqué par aucune voie que Jean Riva, ainsi jugé définitivement, n'a pu être remis en jugement sur le même fait, et que l'arrêt rendu contre lui le 30 avril 1806, contre lequel s'est pourvu le procureur général, renferme un excès de pouvoir 3. Il faut ajouter que cette exception est préjudicielle à tout acte de poursuite. En effet, elle porte sur l'existence même de l'action, c'est-à

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1 Ord. 1670, tit. XXVI, art. 6.

Merlin, Rép., vis Chose jugée, § 20, no 2. 3 Arr. Cass. 12 juillet 1806 (Bull., no 113).

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dire sur le droit du ministère public de l'exercer; il est donc évident qu'elle doit être examinée préalablément à toute décision sur la forme ou sur le fond, car si l'action est éteinte, toute procédure est interdite. La Cour de cassation a jugé en conséquence, sous l'empire de la loi qui déférait les crimes de faux aux cours spéciales, que l'exception de la chose jugée, proposée par un prévenu devant une cour de justice criminelle spéciale, en matière de faux, forme essentiellement une question préjudicielle à toute poursuite; que la Cour spéciale est par conséquent tenue de faire droit sur cette exception, lorsqu'elle statue sur sa compétence; qu'en effet la Cour spéciale, en rendant Parrêt de compétence, déclare évidemment qu'il y a lieu à des poursuites relativement à la prévention, tandis que les poursuites cesseraient si l'exception de la chose jugée était accueillie sous tous les rapports e Bond 1»

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Ces préliminaires posés, nous allons rechercher "quels sont les éléments de la chose jugée et quels actes judiciaires peuvent produire cette exception.

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§ 177, Conditious de l'exception. Il est nécessaire que la première décision ait les caractères d'un jugement.

§ 178. Il faut que ce jugement soit devenu irrévocable.

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§ 179. Il faut qu'il y ait identité entre les deux faits objets, des deux poursuites. Faits distincts.

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Conditions de l'exception.-Il faut qu'il y ait un jugement exécutoire.

L'exception de la chose jugée ne peut évidemment résulter que d'une décision judiciaire, qui soit devenue définitive et qui ait eu pour objet le fait auquel s'applique la nouvelle poursuite. Trois conditions sont donc nécessaires pour constituer cette exception: il faut une décision judiciaire, il faut que cette décision soit inattaquable, il faut enfin qu'il y ait identité entre les deux faits qui sont l'objet des poursuites. L'examen de ces trois conditions demande quelques développements; nous en ferons l'objet de trois paragraphes distincts.

La première condition est qu'une décision judiciaire soit intervenue. Pour qu'il y ait décision judiciaire, dans le sens de la loi, il faut que cette décision ait le caractère d'un jugement, qu'elle soit susceptible d'exécution, qu'elle ait statué sur le

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