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clusions de communication de pièces, par exemple, ou des conclusions au fond. Cela suffit. Mais cela est nécessaire. La signification de ces dernières conclusions ne suffirait pas pour en saisir le tribunal et pour faire décheoir le défendeur du droit de demander la caution (1).

Il pourrait arriver que le demandeur, Français lorsqu'il a intenté le procès, se fit naturaliser étranger au cours de l'instance. A quel moment devra être proposée notre exception? Il faudra que le défendeur l'oppose aussitôt qu'il aura eu connaissance du changement de nationalité de son adversaire. Tout acte de procédure par lui fait après ce moment impliquerait renonciation au droit de demander la caution (2).

Supposons à présent le procès de première instance terminé. L'exception de caution peut-elle être proposée pour la première fois en appel? Autre question très importante et très discutée.

Chacun s'accorde à reconnaître que, lorsqu'un défendeur n'a réclamé aucune caution en première instance, il est censé y avoir renoncé, et ceux mêmes qui l'autorisent à s'en prévaloir pour la première fois en appel lui refusent le droit de la faire porter sur les frais du premier procès.

On a prétendu cependant qu'il fallait déroger à cette règle quand le défendeur avait été condamné par défaut. L'argument en faveur de cette théorie est le suivant. L'art. 166, dit-on, ordonne que la caution judicatum solvi

1. Trib. de la Seine, 7 novembre 1885; Clunet 1886, p. 439. 2. Bruxelles, 26 février 1876, Clunet 1878, p. 510.

soit demandée avant toute exception. Lorsque le défendeur a fait défaut en première instance, il n'a pu opposer aucune exception. Il rentre donc dans les termes de larticle en proposant la caution pour la première fois en appel; et par ce même motif, il pourra y faire comprendre les frais du jugement dont est appel.

Mais on oublie que le défendeur, en se laissant condamner par défaut, a été négligent. C'est du moins, le cas habituel. Or on peut dire, en changeant un mot au vieil axiome: « Nemo auditur negligentiam suam allegans ». Le défendeur n'a pas comparu. Condamné il n'a pas fait opposition. Il doit subir les conséquences de son manque de vigilance. Faisant donc abstraction de ce cas, revenons à l'hypothèse de l'appel d'un jugement contradictoire, et demandons-nous si on peut opposer pour la première fois devant la Cour l'exception de caution dont on n'a pas usé en première instance.

Pour la négative, on fait valoir que l'appel n'est pas une seconde instance. C'est le procès primitif qui se continue, à tel point que la loi interdit d'y former aucune nouvelle demande. Or, il est de principe que toute exception qui ne touche pas à l'ordre public ne peut être opposée pour la première fois en appel. Il en est ainsi de l'incompétence ratione personæ et des moyens de nullité. Il doit en être de même de la caution (1).

Cette argumentation ne nous paraît pas fondée. Sans doute l'instance d'appel n'est pas une instance nouvelle. Il n'en est pas moins vrai qu'il y est fait des frais nou

1. Soloman, Conditions des étrangers; Coin-Delisle, Jouissance des droits civils.

veaux. A ce point de vue tout spécial des frais et de l'intérêt que peut avoir le défendeur à en être garanti, cette instance est véritablement distincte de la première. Le plaideur, qui n'a pas cru devoir exiger une caution pour des frais dont le chiffre lui semblait devoir être insignifiant, peut avoir un intérêt sérieux à la réclamer lorsqu'il voit, par le fait du demandeur, soumettre le débat à une seconde juridiction devant laquelle vont être exposés des dépens nouveaux et plus considérables.

Et d'autre part, le défendeur avait peut-être, lors du procès de première instance, des garanties qui ont disparu au moment de l'appel. L'art. 16, en imposant à l'étranger la charge de la caution, ne fait aucune distinction. La restriction qu'on veut faire admettre ne ressort ni de ses termes ni de son esprit. Son but est la protection du défendeur. Et, dans le doute, c'est toujours cette protection qui doit l'emporter. « D'ailleurs, dit M. Jocot<«<ton, les juges de première instance ne peuvent pas << faire porter la caution sur les frais éventuels d'appel, << puisqu'ils ne savent même pas s'il y aura appel. Le « défendeur sera donc obligé, dans tous les cas, de re<«< demander la caution en appel. Donc le silence qu'il « garde sur ce point devant le tribunal du premier de<< gré, ne le rend pas irrecevable devant le tribunal su<< périeur. >>

C'est en faveur de cette opinion que s'est prononcée le plus généralement la jurisprudenc. Toutefois, elle a subordonné la faculté pour le défendeur de demander la caution en appel à la même condition qui lui est imposée en première instance, celle d'opposer cette exception

avant toute autre défense. Cela est trop naturel pour donner lieu à discussion.

Ce que nous venons de dire de l'appel doit, selon nous, s'appliquer au pourvoi en cassation et à la requête civile. Les motifs sont identiques. La solution doit l'être également.

§ VI.

Par quelle procédure doit être demandée la caution judicatum solvi.

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La procédure de notre exception n'offre aucune particularité intéressante.

Devant le juge de paix, c'est verbalement que la caution doit être demandée son obligation est en général fort minime. Lorsque le magistrat ordonne qu'elle soit remplacée par le dépôt d'une somme, cette somme est déposée au greffe (1).

Devant les tribunaux de droit commun, c'est par acte d'avoué à avoué que se fait la demande de caution; requête grossoyée, ne pouvant excéder deux rôles, quand l'affaire est ordinaire; simple acte quand elle est sommaire (2).On décide même qu'il suffit, comme pour l'exception de communication de pièces, de simples conclusions posées à l'audience et signifiées seulement en cas de contestation de la part du demandeur.

C'est toujours à celui qui requiert la caution à prouver l'extranéité de son adversaire.

1. Boncenne, Théorie de la procédure, vol. III, p. 174. 2. Rousseau et Laisney, v. Caution judicatum solvi. »

Le jugement qui ordonne la prestation de la caution est un jugement préparatoire. Il ne peut donc pas prononcer de condamnation définitive aux dépens. Exception toutefois lorsque le demandeur a élevé des contestations, et qu'il a fallu plaider sur l'incident.

Ce jugement, outre l'ordre de donner caution, doit contenir une disposition impartissant au demandeur un délai pour la fournir. Dans le cas contraire, le tribunal est toujours libre d'en fixer un séparément, sous peine de déchéance de l'instance. On poursuit alors l'audience au moyen d'un simple avenir.

Il a été jugé que l'inobservation de ce délai n'entraînait pas déchéance de l'action, et que, tant que cette déchéance n'avait pas été formellement proposée après l'expiration du délai, le défaut de prestation de la caution ne constituait qu'une fin de non recevoir opposable à la demande (1).

Toutefois, il est bien évident que si trois ans s'écoulaient sans que la caution fût fournie et sans qu'il fût fait aucun acte de poursuite, la péremption pourrait être demandée.

Le droit de faire appel du jugement, ouvert seulement lorsque le chiffre de la caution est supérieur à quinze cents francs, est concédé aux deux parties. Le demandeur peut même en user après consignation de la somme.

1. Trib. de la Seine, 17 avril 1886. Clunet 1886, p. 702.

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