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ciers des comptables, fermiers généraux et tous autres ayant le maniement des deniers publics pour les sommes qui lui seront dues, nonobstant toutes saisies précédentes, excepté les frais de justice, frais funéraires et de dernière maladie, les droits des marchands qui réclament leurs marchandises dans les délais de la coutume, et les droits des propriétaires des maisons des villes sur les meubles qui s'y trouvent, pour six mois de loyer.

Quant aux immeubles, l'édit ordonne que le roi soit privilégié sur le prix de ceux qui ont été acquis depuis le maniement de ses deniers, mais seulement après le vendeur et ceux dont les deniers ont été employés à l'acquisition, lorsque cet emploi sera mentionné dans l'acte si les immeubles ont été acquis avant le maniement, le roi n'a sur eux qu'une simple hypothèque.

Comme la séparation de biens entre les comptables et leurs femmes contribuait souvent à rendre les droits et priviléges du roi inutiles, par le moyen des reprises franches et quittes de toutes dettes que les femmes exerçaient sur les biens de leurs maris, comme aussi par l'intervention des femmes frauduleusement séparées de leurs maris, l'art. 5 de l'édit veut que les dispositions que nous venons d'analyser aient lieu, nonobstant les actions des femmes séparées de leurs maris, à l'égard des meubles trouvés dans la maison du comptable qui n'auront pas appartenu à sa femme avant son mariage, et même sur le prix des immeubles acquis par elle depuis sa séparation, s'il n'est justifié que les deniers employés à l'acquisition lui appartenaient légiti

mement.

Lorsque l'édit de juin 1771 établit le mode des lettres de ratification qui purgeaient toutes les hypothè

ques non conservées par des oppositions au sceau de ces lettres, plusieurs espèces d'hypothèques, notamment celles des femmes sur les biens de leurs maris, furent dispensées de ces oppositions. Les priviléges et hypothèques du roi sur les biens des comptables n'étant pas compris dans lesdites exceptions, on conçut la crainte que les acquéreurs des biens des comptables ne prétendissent avoir purgé ces priviléges par la délivrance des lettres de ratification, sans que les droits du roi aient été acquittés.

Pour ôter tout prétexte à des prétentions aussi contraires aux intérêts de l'État, la cour des aides de Paris rendit un arrêt en forme de règlement le 12 janvier 1781. Cette cour ordonna l'exécution des lois antérieures, et notamment de l'édit du mois d'août 1669, et décida, en conséquence, que les créanciers particuliers des comptables qui avaient fait ou qui feraient saisir leurs immeubles, seraient tenus de représenter les procès-verbaux au procureur général, à l'effet d'obtenir son consentement, à peine de nullité des adjudications.

Il fut pareillement ordonné que tous acquéreurs de biens des comptables, vendus ailleurs qu'au greffe de la cour des aides, seraient tenus, dans le mois, de représenter leurs titres d'acquisition au procureur général, pour obtenir, d'après son consentement, des lettres de ratification, à peine de nullité desdites lettres.

Enfin toutes lettres de ratification obtenues par tous acquéreurs de biens ayant appartenu à des comptables, vendus ailleurs qu'au greffe de la cour et qui n'auraient pas fait signifier leurs titres au procureur général, furent déclarées non avenues à l'égard du roi.

Un décret de l'Assemblée constituante du 14 novem

bre 1790 supprima les receveurs généraux et les receveurs particuliers, et créa les receveurs de district à l'égard desquels elle ne négligea point de prendre les précautions nécessaires à la sécurité des droits du trésor public.

Ces nouveaux comptables furent assujétis à fournir des cautionnements en immeubles. Les actes de cautionnement devaient être reçus par le directeur de district et emporter privilége et préférence sur les biens qui y étaient affectés, à dater du jour des actes y relatifs.

Tous les effets mobiliers et deniers comptants des receveurs de district et de leurs cautions furent affectés au paiement de leurs débets, par privilége et préférence à toute saisie antérieure, même à la femme en cas de séparation postérieure à la nomination du receveur. Il n'y avait d'exception que pour le privilége accordé au fournisseur par les coutumes et celui des propriétaires de maisons sur les meubles, pour six mois de loyer seu

lement.

Les immeubles acquis à quelque titre que ce fût par le receveur, depuis sa nomination, furent pareillement affectés à la sûreté des débets par privilége et préférence à tous autres créanciers, à la réserve seulement de la portion du prix due au vendeur, au créancier bailleur de fonds, et même à tous autres créanciers du vendeur, si les formalités nécessaires à l'établissement et à la conservation de leurs priviléges et droits avaient été observées.

Enfin les administrateurs de district étaient tenus de faire valoir les droits, hypothèques et priviléges établis par la loi, à peine d'en demeurer responsables. Cette

loi de 1790 n'est, à peu de chose près, que le renouvellement, à l'égard des receveurs de district, des dispositions de l'édit de 1669 concernant les comptables remplacés par ces receveurs. Mais il est à remarquer que la loi de 1790 établissait sur les cautions des receveurs de district les mêmes priviléges et hypothèques que sur ces receveurs eux-mêmes et pour le mobilier et pour les immeubles acquis depuis la réception du cautionnement, sans en exepter les biens acquis par les femmes même séparées de ceux qui se rendaient cau

tions.

Par un décret du 8 brumaire an II, la convention nationale avait déclaré que l'hypothèque était acquise sur les biens de tous les comptables, du jour de leur nomination jusqu'à l'apurement définitif de leurs comptes; que les comptables ne pouvaient vendre, aliéner, hypothéquer ni disposer à quelque titre que ce fût de leurs biens immeubles, jusqu'au quitus de leurs comptes, et que les lettres de ratification qui pourraient avoir été ou qui pourraient être obtenues à l'avenir sur les ventes et aliénations faites par les comptables ou leurs ayants cause ne pourraient purger aucune hypothèque au préjudice de la république.

D'après une loi du 11 messidor an III, les comptables ne pouvaient disposer de leurs immeubles soumis à une hypothèque nationale qu'à la charge d'en faire le remplacement, pour que les nouvelles acquisitions demeurassent spécialement affectées à la sûreté des sommes dont le comptable pourrait être reconnu débiteur.

Aussi, dans tous les temps, les pouvoirs législatifs qui se sont succédés, ont pris soin de conserver tous les ga. ges affectés à la sûreté des deniers publics, et les privi

léges et hypothèques dont ces gages étaient grevés par les lois anciennes.

Cet état de choses a subsisté jusqu'à la loi de brumaire an VII, qui a établi un nouveau régime hypothécaire.

ques

Cette loi n'a point atténué les priviléges et hypothèdu trésor public sur les immeubles qui y étaient soumis par les lois antérieures; mais, pour conserver à ces priviléges et à ces hypothèques tous les effets qui leur étaient assurés vis-à-vis des tiers aux époques où ils avaient pris naissance, il fallait non-seulement les faire inscrire, mais encore que les inscriptions eussent été prises dans le délai de trois mois fixé par cette loi, délai qui fut successivement prorogé par les lois des 16 pluviôse et 17 germinal an VII.

La matière des priviléges et hypothèques a été réglée de nouveau par le titre XVIII du Code Napoléon, promulgué à Paris le 29 mars 1804.

En établissant des règles nouvelles, ce Code n'a apporté aucun changement aux droits acquis au trésor public lors de sa promulgation. Il les confirme, au contraire, par l'art. 2098.

Cependant, dans les premières années qui suivirent cette promulgation, il arriva que quelques tribunaux méconnurent les priviléges que les lois avaient, de tout temps, accordés aux deniers publics, se fondant sur ce que le Code, en révoquant les lois antérieures, n'avait point, malgré le § 1er de l'art. 2098, excepté les lois en faveur du trésor. C'est à cette occasion que fut rendue la loi du 5 septembre 1807, qui n'est à peu de choses près que la remise en vigueur des anciennes dispositions.

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