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La méthode extrêmement simple que nous avons adoptée, nous met à même, sans toucher à l'ouvrage de nos prédécesseurs, de le rendre plus utile en le perfectionnant, et de lui donner l'étendue dont il est susceptible, sans anéantir ce qui est fait, et sans changer le plan qu'ils lui ont assigné avec tant de succès.

Ainsi notre premier travail consiste à présenter une table alphabétique de tous les mots insérés dans les neuf premiers volumes, avec l'indication du tome et de la page où ils se trouvent.

Nous nous bornons à cette simple indication lorsque l'article a été traité avec l'étendue qui lui est propre; en conséquence, nous invitons nos lecteurs à consulter d'abord notre table sur le mot qu'ils voudront chercher.

Lorsque l'article est susceptible de quelques corrections, de changemens ou d'augmentations, nous ajoutons au-dessous du renvoi le titre ADDITION; et, sous ce titre, s'il s'agit d'un droit ancien aboli, nous indiquons la loi d'abolition; s'il est simplement modifié, nous faisons connaître en quoi consiste la modification; et, si c'est un droit nouveau, nous en présentons également les développemens.

Lorsque le mot n'est pas suivi d'un renvoi à l'un des neuf volumes publiés, c'est qu'il y a été omis. S'il a pour objet une matière conservée par le droit nouveau, ou qui lui ait servi de base, ou qui soit nécessaire à son développement, nous nous faisons un devoir scrupuleux d'intercaler ce mot dans notre table alphabétique, de le présenter sous les acceptions qui lui sont propres, et sous ses différentes modifications, en adoptant toujours l'ordre alphabétique dans les titres de division, pour plus de facilité dans les recherches.

Nous ne nous bornons point à présenter une sèche nomenclature de nos lois, des décisions des tribunaux, des opinions de jurisconsultes si souvent discordantes. Le droit tient et se rattache sans cesse à toutes les parties de l'ordre public. Il commande toujours les études les plus approfondies, les connaissances les plus vastes, l'esprit d'observation le plus soutenu. L'homme est trop borné dans ses facultés pour être universel; mais il doit s'aider des lumières de tout ce qui l'environne; le jurisconsulte sur-tout doit interroger la nature entière, et, après les plus immenses travaux au milieu

des ténèbres, à peine apperçoit-il l'éclat de quelques étincelles, tant l'homme est difficile à suivre dans les replis tortueux de son cœur.

En nous renfermant dans le cercle étroit de la simple analyse, nous tâchons de remonter quelquefois à l'origine de notre droit; c'est dans cette vue que nous nous permettons d'interroger les fastes des nations qui nous ont précédés, à qui nous devons probablement notre civilisation; les fastes des nations qui nous environnent, et avec lesquelles nous avons le plus ordinairement des relations. En fixant un point essentiel de notre législation actuelle sur une de ces matières importantes qui tiennent de si près à la félicité publique, nous osons porter nos regards jusque sur les législations anciennes; semblables à l'abeille, qui met à contribution les fleurs qu'elle trouve sur sa route, après avoir parcouru la législation des Hébreux, celle des Egyptiens, celle des Grecs, nons nous reposons sur celle des Romains, qui sut se les approprier; nous examinons comment elle s'est introduite parmi comment elle a remplacé et fait oublier nos usages grossiers, et adouci la rudesse de nos mœurs; ce qui en a été adopté chez nos voisins; ses progrès, ses développemens, ses modifications sous les différentes races de nos rois; nous fixons enfin son dernier état parmi nous, au moment où la révolution est venue frapper de destruction presque toutes nos institutions sociales. Nous marquons les jours de ténèbres qui en ont été la suite; et, après avoir parcouru cet état de douleur et de larmes sous les assemblées constituante, législative et conventionnelle, sous le gouvernement directorial, nous arrivons enfin aux premières lueurs que le gouvernement consulaire nous a restituées. C'est alors que nous voyons ce calme rendu à l'univers ébranlé jusqu'à ses extrémités par les secousses révolutionnaires de la France, et, c'est du sein de ce calme, que bientôt nous recevons, de la main bienfaisante du plus grand des héros, un code de lois qui fera oublier celui des Romains.

Outre l'avantage de cet ordre chronologique, qui gravera facilement dans la mémoire l'histoire de notre droit, se présente souvent d'elle-même l'occasion de faire connaître, sinon par la discussion, au moins par les faits, les progrès étonnans que nous avons faits en avons faits en législation, le véhicule puissant qu'elle a reçu des choses même qui pouvaient amener notre anéantissement total: et combien nous sommes devenus, en cette partie, supérieurs aux Romains, que nous avions regardés jusqu'alors, avec justice, comme nos maîtres!

Cette situation est tout en faveur du travail que nous osons entreprendre. Pour trouver quelques maximes, pour rassembler quelques principes épars, pour présenter une doctrine concordante, nos prédécesseurs étaient obligés de fouiller dans des milliers de volumes, d'interroger les décisions ténébreuses, souvent versatiles, presque toujours en contradiction, des jurisconsultes romains, de parcourir une multitude de coutumes infectées de la barbarie des peuples divers qui les avaient apportées avec eux, de digérer des commentateurs innombrables qui les avaient englouties sous leurs indigestes conceptions; de consulter les arrêts des cours souveraines, souvent en opposition sur le même point de droit. Après tant de soins, que trouvaient-ils au fond du creuset? ce que nous appelions naguères une jurisprudence, la seule base de notre droit; et cette jurisprudence, adoptée par un tribunal, rarement suivie avec constance par ses auteurs, loin d'être une règle de décision, n'était pas même un préjugé pour le tribunal voisin, qui avait adopté une jurisprudence toute contraire, et à laquelle il ne tenait pas plus constamment.

Quoique engagés dans une route couverte d'écueils, parce qu'elle n'a encore été frayée par personne, au moins avons-nous l'avantage de marcher à la lueur des principes immuables, que tous les tribunaux de France doivent prendre indistinctement pour règle, et dont ils ne peuvent s'écarter sans encourir la peine de la cassation de leurs décisions. Ainsi, le mot jurisprudence ne sera plus pour nous qu'une expression de souvenir. Nous deviendrons plus sobres de citations en fait d'arrêts, et nous nous étendrons davantage sur les dispositions des lois.

Chacun des articles nouveaux que nous offrons, présente en quelque sorte un traité complet sur la matière, divisé par autant de titres particuliers et de nombres, qu'il est susceptible d'acceptions et de modifications. Vous concevrez notre méthode si, par exemple, sous la lettre A, vous daignez jeter les yeux sur les mots A, matières criminelles; ABANDON des personnes, des choses; ABANNATION; ABCISION; ABDICATION de la couronne; ABJURATION de parenté; ABONDANCE; ABROGATION des lois; ABSENT; ABSOLU (ablatif); ABSOLU (pouvoir); ABUS; ACCAPAREMENT; ACCENSE; ACCEPTEUR; ACCEPTION de personnes; ACCESSION; ACCESSOIRE; ACCIDENT; ACCLAMATION; AccoмАссом

MODEMENT; ACCOMPLISSEMENT; ACCOTTEMENT; ACCROISSE

MENT; ADMINISTRATION, etc. etc. etc.

Si l'on jugeait de la mesure de notre travail par l'étendue que nous avons donnée à ces articles, on s'imaginerait, sans doute, que cette collection présenterait un grand nombre de volumes, et que le public ne pourrait pas jouir de si tôt de la totalité de l'ouvrage; ce serait une erreur.

Quoique notre travail soit fort avancé, nous ne sommes pas en état d'assurer, quant à présent, si la table que nous annonçons composera plus d'un volume ou non; mais nous sommes certains qu'elle n'excédera pas deux volumes, dans sa plus grande étendue. On ne sera point surpris de cette longueur, si l'on veut bien considérer que, d'après la méthode que nous adoptons, les huit premières lettres qui ont été traitées, et dont notre table forme le complément, comprennent la majeure partie des questions et des discussions que notre travail doit comporter. Dans les lettres suivantes, jusqu'à la fin de l'alphabet, un très-grand nombre de mots ne seront que de développement, appartiendront à la matière qui aura été traitée sous le mot principal, et ne présenteront que leur simple nomenclature, avec un renvoi à ce mot principal. Nous pouvons donc assurer, avec certitude que la table des neuf premiers volumes étant finie, six ou sept volumes au plus seront suffisans pour épuiser toutes les matières qui doivent être traitées sous les autres lettres de l'alphabet,

Il était nécessaire, pour l'avantage des lecteurs et pour la symétrie de l'ouvrage, que la table que nous présentons, qui n'aura de prix que par la précision de sa méthode et par le plus grand ensemble, fût l'ouvrage de la même main. Nous aurons pour les volumes suivans les collaborateurs les plus distingués par leurs talens, et le public gagnera beaucoup à cette association, soit du côté des lumières, soit du côté de la célérité. Malgré le poids du fardeau que nous prenons à notre charge, nous nous flattons que nous aurons entièrement terminé cette table sous quatre à cinq mois, et que les dernières livraisons seront publiées deux mois après.

Au commencement de l'entreprise, les premiers éditeurs prirent l'engagement de livrer régulièrement deux volumes par an, jusqu'à la fin de l'ouvrage. Malgré les avantages qu'ils avaient sur nous, nous espérons prendre une marche plus rapide, ainsi qu'on va le voir à la fin de cet Avertissement.

Nos prédécesseurs furent assez heureux pour trouver, sous les auspices des chefs suprêmes de la magistrature, autant de protecteurs et de collabora

teurs zélés qu'il existait alors en France de magistrats, de jurisconsultes éclairés et d'hommes de lettres familiarisés avec notre droit, dont les principes se rattachent si intimement avec toutes les autres sciences, et principalement avec les élémens de l'histoire. Chacun s'empressa de leur communiquer, ou plutôt, de leur livrer ses richesses personnelles : discours, harangues, plaidoyers, mémoires imprimés, mémoires manuscrits, décisions sur les questions les plus célèbres, tout leur fut prodigué, et ces largesses furent encore poussées plus loin; chacun voulut mettre la main à l'œuvre, et ils reçurent, tout rédigés, un grand nombre d'articles où la main de maître se faisait sentir à chaque ligne. La gloire d'y voir attaché le nom des auteurs était la seule récompense à laquelle ils voulussent prétendre, persuadés que la perfection de l'édifice rejaillirait sur chacun d'eux, et les indemniserait suffisamment. MM. AGIER, BIGOT DE PRÉAMENEU BOISSERVOISE, GODEFROY, L'HOMME, LE MOINE DESPREZ LE PAGE, LE VASSEUR, MUSCRAY DE LA HAYE, MEUNIER, PIGEAU, POULLIN DE VIEVILLE et SOREAU, dont les talens honorent notre siècle, prirent la plus grande part à ce travail, et daignèrent enrichir notre collection d'un grand nombre d'articles désignés dans l'avertissement de chaque volume.

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L'ouvrage était à peine à moitié, qu'il a été arrêté par la révolution. Un des éditeurs, appelé à des fonctions publiques, a été obligé d'abandonner des travaux qui devaient lui paraître chers, puisqu'ils le couvraient de gloire; l'autre nous a été enlevé par la mort. Les précieuses collections dont ils étaient dépositaires ont été dispersées et anéanties dans les momens de la terreur et des ravages du vandalisme; à peine nous en reste-t-il quelques débris épars.

Honorés de la bienveillance du chef de la justice, qui nous a permis de lui dédier les prémices de notre travail, nous osons espérer que, comme ses illustres prédécesseurs dans l'éminente place qu'il remplit avec tant de dignité, il daignera unir sa protection à nos efforts, et que, sur linvitation de son excellence, comme sur nos humbles supplications, les magistrats de tous les ordres, les jurisconsultes, les hommes de lettres, daigneront concourir avec nous, par tous les moyens qui leur sont propres, à conduire notre entreprise à sa perfection. Comme nos prédécesseurs, nous nous ferons un devoir d'insérer les articles qu'ils voudront bien nous envoyer, sans autres changemens que ceux qui seraient rigoureusement nécessaires pour

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