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annonça dans une dépêche datée du 5 Août, 1810, et adressée au Ministre Américain résidant à Paris. que les Décrets de Berim et de Milan étaient révoqués, et que leur effet cesserait à dater du 1er Novembre suivant, pourvu que Sa Majesté révoquàt ses Ordres en Conseil, et renoncât aux nouveaux principes de blocus; ou que les Etats-Unis fissent respecter leurs droits, entendant par-là qu'ils devaient résister aux mesures de représailles de la Grande-Bretagne.

Quoique la révocation des Décrets Français ainsi annoncée, dépendit évidemment ou de concessions à faire par la Grande-Bretagne, (concessions auxquelles il était clair que la Grande Bretagne ne pouvait pas se soumettre) ou de mesures à adopter par les Etats Unis d'Amérique; le Prési dent des Etats-Unis regaida tout-à-coup la révocation comme une chose absolue. Sous ce prétexte, l'acte de Non-Importation fut mis rigoureusement en force contre la GrandeBretagne, tandis que les bâtiments de guerre et les navires marchands de l'ennemi étaient reçus dans les ports d'Amérique.

Le Gouvernement Américain regardant la révocation des Décrets Français comme absolue et effective, demanda très-injustement à la Grande-Bretagne de révoquer confor mément à ses déclarations, ses Ordres en Conseil. Le Gouvernement Britannique nia que la révocation, qui était annoncée dans la lettre du Ministre des Affaires Etrangeres de France, fût de nature à devoir satisfaire la Grande-Bretagne; et afin de s'assurer du véritable caractère de la mesure adoptée par la France, le Gouvernement des Etats-Unis fut requis de produire l'acte en vertu duquel la révocation prétendue des Décrets Français avait eu lieu. Si ces Décrets étaient réellement révoqués, un tel acte devait exister, et il était impossible de donner aucune raison satisfaisante pour le soustraire.

Enfin, le 21 Mai, 1812, et pas plus tôt, le Ministre Américain à Loudres, produisit une copie, ou au moins ce qu'on prétendait être une copie de cet acte.

Cette copie portait la date du 28 Avril, 1811, époque de beaucoup postérieure à la dépêche du Ministre des Affaires Etrangeres de France du 5 Août, 1810, et même au jour y nommé, où devait cesser l'effet des Décrets Français, c'est-à-dire le 1er Novembre suivant. Cet acte déclarait expressément que les Décrets Français étaient révoqués en conséquence de ce que la Législature Américaine avait, par son acte du 1er Mars, 1811, ordonné que les bâtiments

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et marchandises Britanniques seraient exclues, des ports et hâvres des Etats-Unis.

Par cet acte, le seul document que l'Amérique ait produit comme la révocation des Décrets Français, il paraît, sans qu'il soit possible d'élever un seul doute ou la plus légere contestation, que la prétendue révocation des Décrets Français était conditionnelle, ainsi que la Grande-Bretagne l'avait assuré, et non point absolue et finale, ainsi que l'Amérique l'avait soutenu qu'ils n'avaient point été rappelés au temps où le Gouvernement Américain avait dit qu'ils l'a vaient été: qu'ils n'avaient point été rappelés d'après une pro position faite simultanément aux deux Belligérants, mais en conséquence d'un acte préalable fait par le Gouvernement Américain, en faveur d'un Belligérant au préjudice de l'autre; que le Gouvernement Américain ayant adopté des mesures de restriction contre le commerce des deux Belligérants, en conséquence d'édits rendus par les deux, avait révoqué ces mesures en tant qu'elles affectaient le pays qui était l'agresseur, tandis qu'il leur donnait tout leur effet contre la partie lésée; quoique les édits des deux puissances continuassent d'être en force; et enfin qu'ils excluaient les bâtiments de guerre appartenant à un Belligé rant, tandis qu'ils admettaient dans leurs ports et hâvres les bâtiments de guerre appartenant à l'autre, au mépris d'un des devoirs les plus simples et les plus essentiels d'une nation

neutre.

Quoique l'acte ainsi produit ne fût en aucune maniere cette révocation générale et sans conditions des Décrets de Berlin et de Milan, que la Grande-Bretagne avait continuellement demandée, et qu'elle avait le droit de réclamer; et quoique cet acte, considérant toutes les circonstances de son apparition dans ce moment-là, pour la premiere fois, donnât ouvertement lieu de soupçonner fortement son authenticité; cependant comme le Ministre des Etats-Unis le présentait comme étant une copie de l'acte de révocation, le Gouvernement de la Grande-Bretagne, jaloux d'en revenir, s'il était possible, aux anciens principes accoutumés de la guerre de mer, se détermina à révoquer conditionnellement les Ordres en Conseil. En conséquence, au mois de Jum dernier, il plut à Son Altesse Royale le Prince Régent de déclarer en Conseil, au nom et de la part de Sa Majesté, que les Ordres en Conseil seraient révoqués, en tant qu'ils regardaient les navires et les propriétés des Etats-Unis, à dater du 1er Août VOL, XL.

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suivant. Cette révocation devait continuer d'être en force, pourvu que le Gouvernement des Etats-Unis rappelât, dans un temps qui aurait été limité, ses lois restrictives contre le commerce Britannique. Il fut ordonné expressément au Ministre de Sa Majesté en Amérique de déclarer au Gouvernement des Etats-Unis, "Que cette mesure avait été "adoptée par le Prince Régent, avec le vif désir et dans l'espoir, ou que le Gouvernement de France, en se relâ"chant de son systême, pourrait rendre inutile à la Grande"Bretagne de persévérer dans des mesures de représailles, 66 ou que si cet espoir était déçu, le Gouvernement de Sa "Majesté, pourrait, dans l'absence de tous réglements res"trictifs et irritants de part et d'autre, être à même d'avoir avec le Gouvernement des Etats-Unis des explications "amicales, afin de s'assurer si, dans le cas où la nécessité "des mesures de représailles continuerait malheureusement , à se faire sentir, il serait possible de rendre les mesuses "6 que la Grande Bretagne aurait à prendre, plus agréables "au Gouvernement Américain, que celles qui avaient été "suivies jusques-là.”

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Afin de pourvoir à l'événement possible d'une déclararation de guerre de la part des Etats-Unis, avant l'arrivée en Amérique dudit Ordre de révocation, il fut envoyé au Ministre Plénipotentiaire de Sa Majesté, accrédité auprès des Etats-Unis, des instructions (dont l'exécution fut confiée, à une époque subséquente, à l'amiral Sir John Borlase Warren, en conséquence de la discontinuation des fonctions de M. Foster), par lesquelles il lui était enjoint de proposer une cessation d'hostilités, si elles avaient commencé, et d'offrir en outre le rappel simultané des Ordres en Conseil d'un côté, et de l'autre des lois restrictives sur les navires et le commerce Britanniques.

Ils étaient aussi respectivement autorisés à informer le Gouvernement Américain, en réponse à toutes les demandes qui seraient faites relativement au blocus de Mai 1806, tandis que le Gouvernement Britannique continuerait de maintenir sa légalité, "Que par le fait, ce blocus particu"lier avait déjà été discontinué depuis un certain temps, ayant été fondu dans le blocus général, par représailles, des ports de l'ennemi en vertu des Ordres en Conseil, et que le "Gouvernement de Sa Majesté n'avait aucune intention d'a"voir recours à ce blocus, ni à aucun autre des blocus des ports de l'ennemi, fondé sur les principes d'usage de la lọi

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"maritinie, qui étaient en force antérieurement aux Ordres "en Conseil, sans en donner de nouveau notice aux puissances neutres dans la forme accoutumée."

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Le Gouvernement Américain, même avant de recevoir avis de la marche que le Gouvernement Britannique avait adoptée, en était venu dans le fait à la mesure extrême de déclarer la guerre, et d'accorder des lettres de marque, quoiqu'il fût déjà en possession du rapport du Ministre des Affaires Etrangeres de France, du 12 Mars 1812, dans lequel les Décrets de Berlin et de Milan étaient promulgués de nouveau comme lois fondamentales de l'Empire Français, sous le prétexte faux et extravagant que les principes monstrueux qui y étaient contenus, se trouvaient dans le traité d'Utrecht, et étaient conséquemment obligatoires pour tous les Etats. Aucune nation qui n'acceptait pas ce code, nonseulement comme regle de sa propre conduite, mais encore comme une loi qu'elle était tenue de faire observer de force à la Grande Bretagne, ne devait être exempte des peines qui y étaient stipulées.

Dans un manifeste qui accompagnait la déclaration d'hostilités du Gouvernement Américain, ce Gouvernement mettait en avant, outre ses anciennes plaintes contre les Ordres en Conseil, une longue liste de griefs, dont quelquesuns étaient en eux-mêmes fort insignifiants, dont d'autres avaient déjà été mutuellement ajustés, mais dont aucun n'avait encore été allégué auparavant par le Gouvernement Américain comme de nature à servir de motifs de guerre. Et comme pour opposer de nouveaux obstacles à la paix, le Congrès Américain passa dans le même temps une loi prohibaut toute relation avec la Grande Bretagne, d'une teneur telle qu'elle ôtait au Gouvernement Exécutif, suivant la maniere dont le Président lui-même interprétait cet acte, tout pouvoir de rétablir les relations d'amitié entre les deux états, au moins pour ce qui concernait celles du commerce, jusqu'à ce que le Congrès ne se ré-assemblât. Le Président des Etats-Unis a, à la vérité, proposé depuis un armistice à la Grande Bretagne; non pas, cependant, en admettant que la cause de la guerre sur laquelle on s'était appuyé, était mise de côté; mais bien sous la condition que la Grande Bretagne, comme démarche préliminaire, ferait disparaître une cause de guerre qu'on mettait alors en avant pour la premiere fois; c'est-à-dire, qu'elle renoncerait à exercer le droit incontestable de visite qu'elle a, afin de rechercher et

de saisir à bord des bâtiments marchands Américains les matelots Britanniques, sujets nés et naturels de Sa Majesté : et cette condition était exigée sous la seule assurance que la législature des Etats-Unis ferait des lois pour empêcher ces matelots d'entrer à leur service; mais indépendamment de l'objection naturelle qu'il y a à accorder à une puissance étrangere une confiance exclusive pour la conservation d'un intérêt aussi vital, l'agent qui était chargé de cette ouver ture, n'offrait et ne pouvait offrir aucune explication ni sur les principes sur lesquels ces lois devaient être fondées, ni sur les clauses que l'on proposait d'y insérer. Cette propos sition ayant été refusée, il en fut fait une seconde, par la quelle on offrait de nouveau un armistice, pourvu que le Gouvernement Britannique voulût stipuler secretement qu'il renoncerait à l'exercice de ce droit dans un traité de paix. On ne demandait point un abandon immédiat et formel de son exercice, comme condition préliminaire d'une cessation d'hostilités; mais on demandait à Son Altesse Royale le Prince Régent, au nom et de la part de Sa Majesté, d'abandonner secretement ce que dans la premiere ouverture on lui avait proposé d'accorder publiquement.

Cette proposition si offensive fut aussi rejetée, étant accompagnée, ainsi que la premiere l'avait été, d'autres demandes de la nature la plus récusable, et spécialement d'une indemnité pour tous navires Américains détenus et condam nés en vertu des Ordres en Conseil, ou de ce qui était appelé blocus illégaux; accéder à ces demandes, indépendam ment de toute autre objection, aurait été à peu près faire l'abandon absolu des droits sur lesquels ces Ordres et ces blocus étaient fondés.

Si le Gouvernement Américain avait été sincere en représentant les Ordres en Conseil comme le seul sujet de différend entre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, qui fût de nature à mener à des hostilités; on aurait pu s'at tendre que dès que la révocation de ces Ordres lui aurait été annoncée officiellement, il aurait retiré spontanément ses "Lettres de Marque," et manifesté quelque disposition à rétablir aussitôt les relations de paix et d'amité entre les deux puissances.

Mais la conduite du Gouvernement des Etats-Unis ne répondit d'aucune maniere à une attente aussi raisonnable.

L'Ordre en Conseil du 23 Juin ayant été communiqué officiellement en Amérique, le Gouvernement des Etats

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