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Le Code semble borner ce cas à l'instruction ou au jugement de la cause; mais il fautaussi l'étendre à toutes opérations ultérieures. Qui osera prétendre, par exemple, qu'un président ne pourra être pris à partie, s'il ne veut signer le jugement ou le faire exécuter sans une somme d'argent, s'il a été payé pour différer, etc.? Celui qui est victime de ce retard aurait sans contredit le droit de prendre à partie ce président.

1le. cas.

« Si la prise à partie est expressément prononcée par la loi. »

Ce cas se rencontre rarement; mais on en trouve des exemples, sur-tout en matière criminelle.

III. cas. « Si la loi déclare les juges responsables, à peine de dommages et intérêts. »

Il y a lieu à dommages-intérêts chaque fois que la prévarication du juge porte préjudice à la partie; mais le respect dû à la magistrature ne permet de condamner un juge à des dommages-intérêts que dans le cas où le législateur prononce cette peine. Voy. par exemple, art. 15, tit. 11 de l'ordonnance de 1667.

IVe, cas. « S'il

y a déni de justice, 505. »

<< Il y a déni de justice lorsque les juges re

«

fusent de répondre les requêtes, ou négligent de juger les affaires en état et en tour d'être jugées, 506. »

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Ils ne pourraient même pas refuser de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi. » Art. 4 du Code civil.

Mais pour pouvoir accuser le juge de déni de justice, il faut l'avoir pour ainsi dire constitué en demeure de juger; il faut avoir constaté son refus, sa coupable persévérance; car il est possible que la requête lui soit présentée, que l'affaire soit en état sans qu'il en soit personnellement informé, et nulla intelligitur mora ubi nulla petitio est. L. 88, ff. de reg. jur. En conséquence la partie qui demande justice ou jugement, est obligée de faire au tribunal ou au juge, dans la personne du greffier, deux réquisitions de trois jours en trois jours au moins pour les juges de paix et de commerce, et de huitaine en huitaine pour les autres juges (1).

La loi regarde que ce n'est qu'avec cette double réquisition que le déni de justice est constaté, et que le juge peut être pris à partie, 507, 508.

Pour que l'huissier comprimé par la crainte

(1) Voy. Rodier sur l'art. 4 du tit. 25 de l'ordonnance.

d'offenser les juges en leur donnant une réquisition nécessaire, ne refuse point son ministère à la partie, la loi l'y assujettit à peine d'interdiction (1). Sans cette peine rigoureuse, la partie ne pourrait agir faute d'officiers ministériels, et elle risquerait souvent de voir son instance ou son action périmée.

«Rien de plus juste, disait la COUR DE COLMAR, que d'appliquer une peine au refus de l'huissier de faire les réquisitions: celle de l'interdiction à tems paraît pouvoir être adoptée dans ce sens l'art. 507 s'explique trop vaguement, puisque ces mots, à peine d'interdiction, présentent un sens indéfini. Or, une interdiction définitive semble trop sévère vis-à-vis d'un huissier, dont le refus peut avoir pour motif le respect qu'il a pour le tribunal auquel il doit faire les réquisitions, et auquel il peut se trouver attaché; la crainte peut aussi avoir déterminé son refus..... La disposition de l'article laisse encore un point à éclaircir. Quelle est l'autorité qui prononcera la peine d'interdiction? »

En parlant simplement de l'interdiction, sans dire qu'elle sera définitive ou momentanée,

1 Voy. art. ibid.

nous croyons que la loi a laissé le choix de l'une ou de l'autre suivant le cas ; quant à la deuxième question de la cour de Colmar, nous estimons que l'interdiction sera prononcée comme dans les cas ordinaires par le tribunal, sauf les formalités subséquentes, si la prise à partie ne le décomplette pas; dans le cas contraire, nous ne voyons point de tribunaux compétens, nous estimons qu'il faut se pourvoir en règlement de juges.

L'huissier, ajoutait la COUR DE TURIN, devrait faire mention, tant sur l'original que sur la copie des réquisitions, du jour de leur signification. Il serait aussi convenable qu'avant la première réquisition, une requête énonçant le déni de justice, fut présentée au président du tribunal dont le juge à qui elle est adressée est membre. »

<< S'il s'agit de prise à partie contre un tribunal de première instance ou de commerce, une requête préalable à la réquisition devrait être présentée au premier président de la cour d'appel à laquelle lesdits tribunaux ressortissent. »

<< Les commentateurs qui traitent de la prise à partie, nous apprennent qu'il fallait rapporter la permission du roi avant que d'attaquer une cour entière ou une section de parlement; peut

être conviendrait-il de renouveler cette disposition relativement aux cours d'appel. »

Ces précautions n'étant point prescrites par la loi, on ne doit pas les employer. Voy. seulement l'art. 510 ci-après.

S III.

Devant quel tribunal doit-on porter la prise à partie ?

Il n'est plus ici question d'un procès ordinaire, c'est la conduite, le fait, la moralité d'un juge qui est l'objet du litige; il faut done s'environner d'un plus grand appareil, provoquer un plus grand concours de lumières et procéder avec beaucoup de précaution.

C'est par ce motif, que la coUR DE Rouen observa, sur l'article du projet qui portait que la prise à partie contre les juges de paix, contre un juge du tribunal de commerce et de première instance, serait portée au tribunal de première instance: « que cetarticle dérogeait au droit ancien qui rendait les cours seules compétentes pour connaître des prises à partie. Il est probable que les juges des tribunaux de commerce, fort utiles et qui exercent des fonctions gratuites, verraient avec peine une disposition qui, sous

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