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vit là un empiétement sur la prérogative royale et, à cet égard comme à quelques autres, les résolutions des députés ne purent être maintenues.

La session avançait rapidement vers son terme, lorsque la proposition de M. Schott, concernant la liberté de la presse, fut mise en délibération (5 novembre). L'assemblée était au grand complet, un seul membre s'étant absenté pour affaires urgentes. Les membres au nombre de 91, moins le président, déposèrent leurs votes, motivés pour la plupart, pendant qu'un silence profond régnait dans la salle et que les galeries encombrées de spectateurs prêtaient à tout l'attention la plus passionnée. Le résultat ayant donné 64 voix pour et 27 contre la proposition, des applaudissemens et des bravos bruyan's éclatèrent de toutes parts. La Chambre eut ensuite à se prononcer sur l'allocation des censeurs. M. Schott proposa de reconnaître la dépense pour le passé, mais de la refuser pour l'avenir, ce qui fut adopté à une majorité non moins imposante (64 contre 22).

Un fait qui eut lieu quelques jours après, offre un rapprochement curieux avec cette double décision si remarquable. La Gazette du Necker paraissant à Stuttgard et n'imprimant que ce que le gouvernement voulait bien laisser passer, puis-qu'elle était soumise à la censure, fut supprimée par ordre de la diète germanique. Il était, comme de coutume, interdit pendant cinq ans aux rédacteurs de cette feuille de concourir à la rédaction d'aucun autre journal allemand, et le gouvernement wurtembergeois était invité à informer la diète dans le plus court délai, des mesures qui auraient été prises pour l'exécution de ce décret. Au même moment la Chambre des députés apprenait que la proposition de M. Schott avait été rejetée par la Chambre des seigneurs.

Ainsi quelque parti que prît la Chambre des députés elle rencontrait partout des obstacles. Les réductions qu'elle avait faites dans le budget voté le 6 décembre à une majorité de 70 voix contre 19, ne furent pas même respectées; un Ann. hist. pour 1833.

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rescrit du conseil privé vint lui annoncer que les retranchemens qu'elle avait opérés sur le traitement des ministres ne seraient pas sanctionnés par le gouvernement, et l'inviter à modifier dans ce sens le budget adopté. Mais la Chambre répondit sur-le-champ par une déclaration portant qu'elle maintenait sa décision et qu'elle réservait ses droits constitutionnels sur ce point. Elle se détermina aussi, faute du concours de l'autre Chambre, à présenter seule une adresse au roi pour le réta blissement de la liberté de la presse,

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C'est le dernier acte que nous ayons à signaler dans cette session. Le 9 décembre, le roi vint en faire la clôture par un discours dans lequel, après avoir adressé à la Chambre des seigneurs des remercimens affectueux dont la Chambre des députés n'eut point sa part, il se félicitait surtout du succès de ses efforts et de ceux du roi de Bavière

pour amener le traité de douanes qui, au bout de douze années de négociations, venait enfin d'être conclu avec la Prusse, la Saxe et les autres états de l'Allemagne.

GRAND-DUCHÉ DE BADE.

Le grand-duc de Bade, en ouvrant le 20 mai la session des Chambres, parla des modifications faites l'année précédente à la loi sur la presse, et ajouta que son ministère exposerait les motifs qui l'avaient déterminé à prendre une pareille mesure. Il annonçait ensuite plusieurs projets de loi qui tendaient tous à améliorer le bien-être des populations.

La Chambre des députés crut devoir aborder sans retard, dans son adresse même, les questions de la liberté de la presse et du décret de la diète germanique du 28 juin 1832, et cela d'une manière si tranchée, à côté de l'expression de son dévoûment pour le prince, qu'il importe de reproduire ici ses propres paroles :

« C'est avec une profonde affliction, disait-elle, que votre fidèle peuple

DUCHÉ DE BADE

titano 300 talaj »

a appris les changemens par lesquels la loi sur la liberté de la presse, cette loi si long-temps désirée et si propre à garantir la constitution, doit perdre ses fondemens. Nous attendons les communications que V. A. R, nous as annoncées, leur examen circonspect sera pour nous une tâche de la pluss grande importance, afin que nous puissions ensuite prendre à cet égard la decision q que notre devoir nous imposera... 200

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a

Nous ne pouvons non plus passer sous silence les profondes inquiétudes qu'a occasionées, chez votre peuple, fidèle, dont l'esprit, attaché à la léga lité est resté étranger a les moyens et à tous efforts illégaux, le contenu de la résolution de la diète germanique du 28 juin 1832, puisque cette résolution permet une interprétation qui pourrait menacer la consti tution et restreindre les droits constitutionnels. Nous conservons, en tout cas, l'intime conviction, que l'idée de blesser la constitution est bien éloi-> grée de V. A. R., mais cependant nous nous réjouirions de recevoir des assurances tranquillisantes, qui détruisissent, pour l'avenir, toute incertitude à cet égard. » SULKE 29 así éuce abiguani nejča angh amos Après avoir énuméré avec satisfaction les différens p pro-g jets de loi qui lui avaient été annoncés, et surtout les projets relatifs à la régie des forêts, à l'abolition des dimes et à la diminution du prix du sel, la Chambre poursuivait ainsi

« Puisse V. A! Revoir dans nos délibérations et nos propositions, notre désir

négligeant de favoriser les intérêts matériels de nos concitoyens,

- sans

fonder leurs intérêts intellectuels! Car nous sommes convaincus qu'il existe entre ces intérêts une sympathie si intime que, pour fonder d'une et qu'un peuplé ne peutes intérêts matériels, il faut une base intellectuelle,

peuplé ne peut obtenir de dignité et être heureux, que lorsque avec la possession des avantages matériels, il jouit aussi de la liberté intellectuelle et de ces droits

ment et plus de considération Comment un plus grand développe

pour

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Le grand-duc répondit, en rejetant d'ailleurs tout ce qui avait été fait sur les excès de la presse, que la saine raison du peuple avait déjà pu, depuis la publication des résolutions de la diete germanique, revenir entièrement des inquiétudes qu'elles avaient inspirées dans le principe. Cette même raison avait fait comprendre aux Badois qu'il n'aurait pas acquiescé à ces résolutions, si l'on avait dû reconnaître en elles, même dans un avenir éloigné, l'intention de miner les constitutions allemandes.

«La confiance que vous m'exprimez à cet égard, ajoutait le grand-duc, n'est pas seulement juste, mais encore elle doit être le véritable sentiment de ceux qui vous ont choisis comme leurs représentans. Il doit donc paraître plus que superflu de vous donner aujourd'hui des assurances particulières que ces résolutions de la diète n'ont jamais eu pour base la tendance qu'on leur prête ; que leur exécution fédérale n'est nullement contradictoire avec ma position constitutionnelle, et qu'elles ne peuvent

entraver ma marche qui tend à maintenir notre constitution, et particulièrement les droits des citoyens et les travaux des Etats. Cependant et surabondamment, je vous doune ici solennellement ces assurances, et je le fais avec plaisir, puisque vous me dites qu'elles vous seront agréables, et je serai très-satisfait que ces paroles soient insérées dans votre protocole, comme un monument durable de mes sentimens présens et à venir. En échange, j'attends de mes fidèles Etats que ces paroles simples et sincères d'un prince dont le cœur bat toujours pour le bonheur de son peuple, leur suffisent, fet qu'ils y trouvent le motif d'une parfaite sécurité. »

Cette adresse et cette réponse n'exprimant pas une parfaite harmonie entre la Chambre et le prince, quant à la manière d'envisager les décrets de la diète germanique, il était à craindre que des difficultés graves ne s'élevassent dans le cours d'une session inaugurée sous les mêmes auspices, à peu près, que celle des États de Wurtemberg. Une commission fut nommée pour examiner les actes relatifs à l'abrogation de la loi de la presse, et son rapport était attendu avec une certaine anxiété. Lorsque le jour eut été fixé pour la lecture de ce rapport, le gouvernement demanda le comité secret. La Chambre s'y opposa d'abord; mais prévoyant que la dissolution qui avait déjà puni la résistance des États de Wurtemberg et de Hesse-Cassel, et qui planait alors sur toutes les assemblées délibérantes de l'Allemagne, ne l'épargnerait pas non plus, elle prit un terme moyen. La question fut divisée en deux sections, et l'on décida qu'on discuterait en séance secrète la section qui amenerait nécessairement des explications sur les rapports avec la diète gérmanique, et, en séance publique, la section qui avait pour objet l'abrogation de la loi de la presse. En résultat, la Chambre adopta une résolution portant que les changemens faits à la loi de la presse, en vertu de l'ordonnance du 28 juillet 1832, n'avaient pu être opérés définitivement sans le concours de la Chambre, et qu'ainsi elle attendait des propositions ultérieures, par la voie constitutionnelle, pour l'établissement d'une législation sur la presse, qui concilierait les obligations fédérales du gouvernement avec les droits du pays.

Cependant M. de Rotteck, revenant sur les décrets de la diète, avait fait la motion de nommer une commission d'en

quête qui serait chargée de prendre en considération l'état du pays, et de présenter à la Chambre les propositions qui pourraient découler d'un pareil examen. Après une longue discussion, la majorité se rallia à un amendement qui avait pour but de renoncer à la motion et de faire insérer au procèsverbal la déclaration que la Chambre s'en référait à la réponse du grand-duc à l'adresse, et qu'elle croyait devoir répéter que les résolutions de la diète germanique ne sauraient recevoir légalement une interprétation contraire aux garanties constitutionnelles du pays. Cette décision fut l'objet d'un blâme sévère dans un rescrit royal, en ce qu'elle renfermait, suivant le grand-duc, un mépris de sa parole de prince. En même temps que ce rescrit avait été apporté à la Chambre, le ministre de l'intérieur en avait présenté un autre qui défendait l'impression de la motion primitive de M. de Rotteck. Cette dernière communication excita de vives réclamations, et quelques jours après, M. de Rotteck fit une protestation énergique contre un pareil procédé. La Chambre adopta ensuite unanimement les conclusions de la commission, à l'effet de proclamer qu'elle avait le droit incontestable d'ordonner ou non l'impression de ce qui concernait ses délibérations, et qu'elle était déterminée à le maintenir intact par tous les moyens convenables.

Ces diverses décisions, si elles prouvaient au fond qu'en face de la diète germanique, la Chambre des députés de Bade ne pouvait rien, n'en témoignaient pas moins de l'esprit dont elle était animée, esprit de résistance qui toutefois n'excluait pas une tendance aux moyens de conciliation. C'est ainsi qu'elle adopta les lois proposées par le gouvernement sur les associations et sur les assemblées populaires, tandis d'un autre côté elle critiquait sévèrement l'ordonnance rendue le 5 juin 1832 pour défendre ces mêmes assemblées, et qu'on priait le grand-duc de faire présenter un projet de loi qui garantît la liberté individuelle.

que

Mais cette Chambre qui prenait parfois, avec une énergie

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